Rare florilège de danses de la Renaissance sur un luth d’époque

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Mortua dulce cano. Un florilège de musique pour luth à la fin de la Renaissance. Giulio Cesare Barbetta (c1540-ap1603), Vincenzo Galilei ( ?-1591), Lorenzino Tracetti, Simone Molinaro (c1570-ap1633), Giovanni Battista Domenicho (fl c1600), Kasper Sielicki (c1570- ?), Jacob Reys (c1550-1605), Diomedes Cato (1555-1628), Valentin Bakfark (c1526-1576), Nicolas de Rans (fl c1548), Matthias Reymann (c1565-ap1625 ?), Johannes Spalkaiber, Benedictus de Drusina (fl1556-1573), John Hoskins (fl c1600), John Coprario (c1570-1626), Barick Bulman (fl c1600), Alfonso Ferrabosco (1543-1588), John Whitfield (fl1588-c1620), anonymes. Michal Gondko, luth. Livret en anglais, allemand, français. Octobre 2020. TT 64’33. Ramée RAM2007

Même si vous êtes féru de musique ancienne, ne culpabilisez pas de méconnaître ces compositeurs. Hormis quelques Britanniques comme John Coprario (Anglais qui italianisa son patronyme) ou Alfonso Ferrabosco (Anglais d’adoption), les invités de ce récital ne risquent pas d’encombrer vos étagères : bon nombre de pièces font ici leur apparition dans la discographie. Le programme du CD les organise selon l’aire géographique associée aux œuvres ou leur auteur : Italie, Pologne (complétant par quelques inédits un précédent album Polonica de Michal Gondko paru en 2015 chez le même label), Allemagne, Angleterre, mais aussi la Hongrie de Valentin Bakfark « l’ongaro », et encore les Flandres au gré de Branles de Nicolas de Rans.

Ce florilège est abordé non sur une copie mais sur un des plus anciens luths encore jouables, qui remonte à l’apogée de la Renaissance. Nonobstant une étiquette portant mention de lieu et date (Padoue, 1595), on ne peut en identifier avec certitude le facteur, peut-être Martino Presbyter. Il appartint à Robert Spencer et Thomas Binkley. Le livret retrace ce qu’on sait de son histoire dont on connait mieux les transformations subies depuis le XXe siècle que l’état originel, visé par une restauration de 1996. Il a été généreusement prêté par Andreas Schlegel, son actuel propriétaire, à Michal Gondko qui a su profiter de l’assiduité imposée par le confinement de l’épidémie Covid pour préparer cet enregistrement.

La notice précise que la tension modérée des cordes a ménagé la table d’harmonie. Malgré cette projection adoucie et une sonorité d’ensemble grasse et mate, les sept chœurs restitués à cette vénérable caisse se prêtent de bonne grâce à la galerie de danses qu’anime le luthiste natif de Varsovie, fondateur de l’ensemble La Morra. Avec l’expertise et la sobre élégance qu’on lui connaît, voire un hédonisme non dissimulé, cet élève d’Hopkinson Smith cisèle ce rare répertoire émané des quatre coins d’Europe, que le précieux « Presbyter » fait renaître et qu’il a peut-être déjà fait résonner au cours de son passé quatre fois séculaire. La prise de son en restitue les couleurs melliflues mais aurait mérité une perspective un peu plus fine. Toutefois, rien qui gâche la subtile interprétation de ces saltarelles, courantes, gaillardes et autres gigues, aussi avisée que séduisante, qui ne brusque rien mais en laisse patiemment et respectueusement s’exprimer le suc, argumentum ad verecundiam.

Son : 8 – Livret : 9,5 – Répertoire : 8-9 – Interprétation : 9

Christophe Steyne

 

 

 

 



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