Stewart Goodyear et Beethoven

par

Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Intégrale des Concertos. Stewart Goodyear, piano – BBC National Orchestra of Wales, Andrew Constantine, direction. 2020-DDD-CD1 65’42 CD2 68’54-CD3 38’28-Textes de présentation en anglais-Orchid Classics-ORC100127

Stewart Goodyear n’en est pas à son premier disque Beethoven. A la tête d’une intégrale des Sonates pour piano, le pianiste canadien de 42 ans poursuit son exploration beethovénienne avec les cinq Concerti pour piano, confirmant une passion assumée très jeune pour le compositeur. L’anecdote fait d’ailleurs sourire : Goodyear découvre la musique de Beethoven à trois ans lorsqu’il écoute en une journée l’intégrale des Sonates sur un lecteur Mickey Mouse ! A cinq ans, ce sont les Symphonies avec une préférence immédiate pour les Symphonies n°5, 7 et 9. Journal musical pour les Sonates, plus vulnérables, déclaration pour le public avec les Symphonies : deux faces très éloignées alimentées pourtant par la même puissance dramatique, selon le pianiste. A neuf ans, au gré de concours, c’est au tour des Concerti. Cette rencontre avec Beethoven, cette fusion avec un matériau poétique et une pensée pas toujours évidente à saisir, se ressentent ici à chaque instant. Comme Mahler et Bernstein, Beethoven et Stewart Goodyear ne font qu’un. Chaque concerto trouve un monde esthétique, raconte une histoire. Le langage est à chaque fois différent, réévalué et toujours vivant. Il fait sonner la profondeur du discours tout en accordant une place importante à l’articulation, d’où l’idée de musique vivante. Il y a aussi clairement un sentiment de joie partagée entre le pianiste, le chef, Andrew Constantine, et l’orchestre. Amis de longue date, ils signent ici un coffret d’une grande élégance.

Le Concerto n°1 n’est que fraîcheur et vitalité. Composé entre 1795 puis revu en 1800, le Concerto en do majeur garde encore quelques influences mozartiennes. Le duo développe un langage propre à cette esthétique encore jeune, vivant et humain.

Le Concerto n°2 date de 1801 et expose une atmosphère plus délicate et élégante. A nouveau, le duo adopte une attitude irréprochable et s’approprie le matériau avec finesse et bienveillance. Le jeu est rayonnant, solaire et volontiers intime, tout comme le Concerto n°3 et particulièrement la poésie si touchante du second mouvement. La forme d’intimité, que l’on retrouve d’une certaine manière dans le premier mouvement, est ici à son comble. Le pianiste se laisse aller dans une pensée libre, affranchie de toute contrainte. Un peu de rubato par-ci, du timbre par-là, une multitude d’éléments qui s’allient naturellement. Le troisième mouvement est particulièrement jouissif d’articulation, tant au piano qu’à l’orchestre.

Le Concert n°4 avec son étonnante introduction au piano est peut-être le plus accompli expressivement des cinq. D’une veine lyrique, les artistes optent pour une nouvelle approche, plus ronde, généreuse sans doute, et une phraséologie qui repose sur la respiration et la longueur. Enfin, c’est l’apothéose avec le n°5, grandiose dans son premier mouvement, chambriste dans le second et brillant dans le dernier. 

Une intégrale très réussie, un dialogue idéal et efficace, du très beau Beethoven.

Ayrton Desimpelaere

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 10

 

 

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