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L’irrésistible Périchole d’Offenbach à l’Opéra-Comique

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Jacques Offenbach (1819-1880) : La Périchole, opéra bouffe en trois actes. Stéphanie d’Oustrac (La Périchole), Philippe Talbot (PIquillo), Tassis Christoyannis (Don Andrès de Ribeira), Eric Huchet (Don Miguel de Panatellas), Lionel Peintre (Don Pedro de Hinoyosa) ; Chœur Les Éléments ; Orchestre de chambre de Paris, direction Julien Leroy. 2022. Notice et synopsis en anglais et en français. Sous-titres en français, en anglais, en allemand, en japonais et en coréen. 139.00. Un DVD Naxos 2.110756. Aussi disponible en Blu Ray. 

Sans kilts, ruines ou bruyères, Lucia di Lammermoor subjugue toujours Paris

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Cette reprise de la mise en scène d’Andrei Serban pour le chef d’œuvre de Donizetti date de presque trente ans. Elle n’a pas vieilli puisqu’elle n’a pas d’âge. Seuls, costumes, accessoires et articulations des passerelles accusent la fatigue. Les allusions aux séances du Professeur Charcot à la Salpêtrière sur l’hystérie, les chœurs coiffés de hauts-de-forme alignés en rangs d’oignons autour de l’amphithéâtre-citerne restent incongrus mais discrets. Dans l’arène, gymnastes aux agrès, conscrits, échelles croisées, jeux de scènes périlleux sont supposés mettre en évidence la solitude d’une héroïne broyée par l’univers masculin.

C’est oublier un peu vite les motifs de la haine qui oppose les Ashton et les Ravenswood et, surtout, que c’est Lucia qui tient le poignard et qui tue. Déraciner la Fiancée de Lammermoor de son terreau écossais, du contexte de son élaboration (1835), en faire une abstraction hors sol, c’est aussi l’appauvrir et même la gauchir.

Heureusement, la dynamique dramatique voulue par Donizetti opère à plein régime servie par d’excellents interprètes qui font oublier ce morne parti-pris.

Les premières mesures laissent présager un sens dramatique haletant de la part du jeune chef (né en 1988) de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Aziz Shokhakimov. Les interventions des pupitres solistes (cuivres en particulier), l’inertie des masses chorales, l’exigence de mise en place (fameux sextuor, A.II) rendent la suite moins cohérente. Toujours à l’écoute des chanteurs, le chef ousbek leur offre un espace propice au bel canto. S’il n’en est pas tout à fait familier, nul doute que ce surdoué sensible ne s’enrichisse très vite au contact d’artistes tels Javier Camarena et Mattia Olivieri.

 A tout seigneur, tout honneur, le baryton italien fait une entrée fracassante sur la scène parisienne. Beau, fringuant, il habite l’espace scénique et sonore d’un irrésistible magnétisme.

Son art du chant coloré, riche, libre, apporte au personnage d’Enrico, frère de l’héroïne, habituellement brutal, borné et antipathique, une stature inhabituelle. La violence se fait plus humaine et la séduction du couple qu’il forme avec sa sœur Lucia le rend beaucoup plus intéressant.

Phénomène rare, la qualité de l’interprétation jette une lumière nouvelle sur l’œuvre. Ici, elle met en évidence le versant manifestement incestueux de la relation fraternelle.

Face à lui, l’amant maudit, Edgardo, trouve en Javier Camarena  un interprète qui met son art des nuances et la texture chatoyante de sa voix au service du personnage. Son aria di tomba du dernier acte « Tombe degli avi miei » aussi belle que désespérée reçoit une ovation méritée.

A la folie ou pas du tout ? Passionnément, d’André Messager

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André Messager (1853-1929) : Passionnément, comédie musicale en trois actes. Véronique Gens (Ketty Stevenson), Etienne Dupuis (Robert Perceval), Nicole Car (Julia), Eric Huchet (William Stevenson), Chantal Santon Jeffery (Hélène Le Barrois), Armando Noguera (Harris) ; Münchner Rundfunkorchester, direction : Stefan Blunier. 2020. Notices en français et en anglais. Livret complet en français avec traduction anglaise. 77.03. Un livre-CD Palazzetto Bru Zane BZ 1044.

Fêtes musicales d'exception à Monte-Carlo

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L'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo a eu le privilège d'accueillir Charles Dutoit pour deux concerts en deux semaines.

Le premier concert était intégralement consacré à Maurice Ravel avec des oeuvres peu jouées en concert : Ma mère l'Oye (dans la version Charles Dutoit qui a librement choisi cinq numéros) et L'Heure espagnole. On connaît les liens étroits entre le chef suisse et l’univers de Ravel. Charles Dutoit arrive à tirer les nuances les plus poétiques de chaque groupe d'instruments de l'orchestre tout en faisant chanter les premiers pupitres : le violon de Liza Kerob, le violoncelle de Thierry Amadi  ainsi que la flûte, la harpe, la clarinette, le contrebasson, le cor, le célesta et les timbales. 

Des deux opéras de Ravel, L'Heure espagnole est de loin le moins joué. Mais s’il ne possède pas la poésie du texte de Colette pour l’Enfant et les Sortilèges, le livret de Franc-Nohain pour l’Heure espagnole dégage le charme désuet d’un théâtre de boulevard sur fond d’une Espagne fantasmée. La précision ainsi que le sens des couleurs et du rythme sont parfaitement présents sous une direction orchestrale scintillante et chatoyante. La distribution vocale est parfaitement idoine avec  le ténor Eric Huchet (Torquemada, un horloger), la soprano Karine Deshayes (Concepción, la femme de Torquemada), le baryton Thomas Dolié (Ramiro, un muletier), le ténor Julien Behr et la basse David Wilson (les amants,  Gonzalve, un bachelier poète et Don Iñigo Gomez, un riche financier). 

Maître Péronilla, la résurrection d’un Offenbach irrésistible

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Jacques OFFENBACH (1819-1880) : Maître Péronilla, opéra-bouffe en trois actes. Véronique Gens (Léona), Eric Huchet (Maître Péronilla), Anaïs Constans (Manoëla), Tassis Christoyannis (Ripardos), Chantal Santon-Jeffery (Alvarès), Antoinette Dennefeld (Frimouskino), François Piolino (Don Guardona), Patrick Kabongo et Loïc Félix (Frères Vélasquez), etc. ; Choeur de Radio France, Orchestre National de France, direction : Markus Poschner. 2020. Livret en français et en anglais. 100.40. Un livre-disque du Palazzetto Bru Zane BZ 1039 (2 CD).

La Salle Favart célèbre le 200e anniversaire d’Offenbach avec Madame Favart

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Madame Favart, l’opéra comique en trois actes d’Offenbach créé à la fin de sa vie en 1878 -il mourra en 1880- permit au compositeur d’origine allemande un retour « sur scène » après une période difficile suite à la défaite française face à la Prusse. C’est le dernier éclat de sa vie, le « dernier grand succès » selon le chef Laurent Campellone.
Mais notre impression sur cette production est mitigée : il est déconcertant de suivre constamment un mélange de musiques de styles tout azimut pendant 2 heures 30. Certes, Offenbach savait parfaitement comment fonctionnait le public et il a concocté une belle partition qui, à la fois, répondait aux attentes de ce dernier et le surprenait. Ainsi, à côté d’un joyeux ensemble pour l’Orphée aux enfers, on trouve des envolées lyriques très amples ou encore une tyrolienne. Aujourd’hui, pour nos oreilles qui ne sont pas (ou plus) habituées à ce genre de patchwork, la surprise agit autrement et il nous faut du temps pour pouvoir tout digérer… Au milieu de tout cela, cependant, un très bel air de Charles-Simons Favart dans l’acte III, justement surprenant dans sa facture (on frôle le music-hall !), montre le parfait savoir-faire de l’homme qui fut un temps le roi de l'opérette.

La Belle Hélène dans les visées de la mission « beauté fatale » à Nancy

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Chaque production de La Belle Hélène est si attendue par les amoureux de Jacques Offenbach qu'elle représente un défi pour tout metteur en scène. Comment présenter cette opérette archi-connue sans tomber dans la banalité ou la vulgarité, tout en proposant une lecture neuve et amusante ? La parti pris de Bruno Ravella à l’Opéra National de Lorraine (jusqu'au 23 décembre) est de jouer avec la surperficialité, l’hypocrisie d’un pouvoir déconnecté de la réalité et qui cultive sa futilité, en s'appuyant sur des situations identifiables pour le public d’aujourd’hui.