Xavier Sabata et Vespre d’arnadi : la musicalité idéale
L’ ALESSANDRO AMANTE. Xavier SABATA, contre-ténor. VESPRES D’ARNADI. Dani ESPASA clavecin et direction. BONONCINI, HAENDEL, PESCETTI, STEFFANI, DRAGHI, MANCINI, VINCI, LEO, PORPORA. 2018- 64.30- livret en espagnol-français- anglais-textes en italien, français, anglais- chanté en italien- apartemusic APE 192
Disque remarquable ! L’orchestre clair, bien en chair et admirablement lisible donne -d’entrée- la « tonalité » : nous savons que tout sera beau, bien construit, avec des archets mordant la corde, une vigueur de tous les instants, des tenues légères, vives, éloquentes.
Alexandre -celui que les Français appellent « Le Grand »- a été l’objet, aux beaux temps du Baroque, de très nombreuses approches et par les plus grands musiciens : de Haendel à Bononcini, en passant par Pescetti, Steffani, Vinci, Porpora… A travers eux, hommage est rendu au conquérant, à l’amoureux, au philosophe, au trahi quand il n’est pas lui-même traître sans le vouloir totalement… D’où cette plainte mystérieuse (Serbati a grandi imprese Leonardo Vinci), cette vaillance de héros (Bononcini) ou cette ardeur qui s’épanche d’un coeur enamouré que nous invente un Haendel marqué par l’Italie… Tout serait à citer, car juste, frémissant, gorgé de beauté. Mais le contre-ténor catalan n’est pas seulement le concepteur de ce savant programme.
Là interviennent l’interprète musicien et... la voix. Timbre velouté, intonations parfaites comme la diction qui met les mots importants en valeur sans jamais s’éloigner d’un naturel plein d’élégance teinté d’une discrète mélancolie. Les ornements précis se fondent dans l’expression tour à tour et -parfois en même temps- véhémente, extatique ou tendre. La musicalité de l’imbrication instruments-voix est un enchantement renouvelé (Chiare faci de Bononcini). La rhétorique se fait danse et relance sans cesse cette délicieuse conversation où clavecin, orchestre et voix s’amusent et se surprennent de contrastes, de changements d’humeur, d’effectifs ou de rythmes. Passionnant. Décidément, le vivier des contreténors -tous plus admirables musiciens les uns que les autres- et l’apport de la Catalogne à la musique baroque ne cessent de surprendre et d’émerveiller.
Bénédicte Palaux Simonnet