A Genève, le Festival Goyescas

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Chaque automne, l’Association Amigos de Espana propose, en l’espace de quatre jours, son Festival Goyescas qui réunit la littérature, le cinéma et la musique.

Ainsi, pour sa quatrième édition, la cinéaste Arantxa Aguirre rejoint Jean Ellgass, l’administrateur du Béjart Ballet Lausanne pour présenter son film, Dancing Beethoven, relatant les neuf mois de préparation et la recréation de la Neuvième selon Maurice Béjart à Tokyo en novembre 2014. Ensuite se succèdent deux rencontres littéraires avec la conteuse Casilda et la journaliste et romancière Carme Chaparro puis le concert de clôture au Victoria Hall intitulé « Dialogues celtiques : L’homme et la nature ».

Dans un programme de 90 minutes, Jordi Savall rejoint le joueur de flûte et cornemuse galicien Carlos Nunez et ses deux musiciens ainsi que le flûtiste et percussionniste Frank McGuire et le réputé harpiste Andrew Lawrence-King. Car son rêve serait un monde où pourraient cohabiter pacifiquement les différentes cultures et religions. A ce propos, quel exemple constitue la musique celtique qui, pendant des siècles, s’est imposée depuis l’Irlande et l’Ecosse jusqu’à la Galicie en passant par la Bretagne et le Pays basque. Longtemps, l’on a considéré que cet art émanait d’une tradition orale ‘folklorique’, alors que nombre de mélodies ont été notées par des amateurs de la fin du XVIIe siècle jusqu’au XIXe, en s’insérant ainsi dans le courant baroque du moment.

Intervient d’abord Carlos Nunez s’emparant avec vigueur de sa cornemuse, ce qui suscite une immédiate effervescence dans le public. Puis ‘The Caledonia Set’ voit Jordi Savall jouer une basse de viole aux cordes croisées datant de 1753 et dialoguer avec harpe et tambourin en imprégnant de nostalgie une page traditionnelle irlandaise, Archibald MacDonald of Keppoch, tandis que le flageolet accélère la cadence dans Caledonia’s Wail for Niel Gow du Captain Simon Fraser. La flûte et le psaltérion nous reportent ensuite à la seconde moitié du XIIIe siècle, quand le roi Alphonse X le Sage codifiait la tradition orale dans ses Cantigas. Puis lyra-viol, bag-pipe et bodhran, curieux instrument de percussion, nous ramènent en Ecosse pour présenter deux cahiers, The Lord Moira Set et Flowers of Edinburgh où le dessus de viole de Jordi Savall pare d’une déchirante tristesse une pièce de Niel Gow (1727-1807), Lament for the Death of his Second Wife. D’un indicible mystère se nimbe ensuite l’évocation de l’Ecossais Turlough O’Carolan que réalise Andrew Lawrence-King en passant de la harpe irlandaise au psaltérion. Et lorsqu’est abordé l’univers celtique s’étendant de la Bretagne au Pays basque, affleure une mélancolie passagère que dissipera la frénésie de la danse, tandis que se profilent les paysages irlandais. Les dernières notes provoquent l’enthousiasme d’une salle comble, ce qui occasionne deux bis. Et à l’issue du concert, le spectateur, sourire aux lèvres, songe immédiatement à une prochaine édition du Festival Goyescas !

Paul-André Demierre

Genève, Victoria Hall, le 30 septembre 2018

Crédits photographiques :  David Ignaszewski

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