Couperin par Rinaldo Alessandrini

par

Louis COUPERIN (1626-1661) : Suites pour clavecin en la mineur, fa majeur et ré mineur. Rinaldo Alessandrini. 2019. Livret en français et en anglais. 79.23. Naïve OP30577.

Le claveciniste, organiste et violiste Louis Couperin, oncle de François, s’inscrit parmi les tout premiers membres d’une famille qui va couvrir une longue période de la musique française. Né à Chaumes-en-Brie, en région Île-de-France, il est découvert par Jacques Champion de Chambonnières, considéré comme le fondateur de l’école française de clavecin. Il s’installe vers 1650 à Paris où sa réussite est rapide ; il devient organiste à Saint-Gervais et violiste à la cour. Tout va aller très vite pour lui, car il ne lui reste que dix ans à vivre. Il laissera malgré cela une œuvre abondante, dont 130 pages pour le clavecin et 70 pour l’orgue -auquel il confère un contrepoint d’une savante richesse-, des pièces en trio ou des fantaisies pour la viole.

Le présent CD Naïve propose trois suites pour clavecin. On sait que les pièces de Louis Couperin pour l’instrument proviennent de deux sources, le manuscrit Bauyn et le manuscrit Parvill, mais que leur ordre n’y est pas organisé. Dans l’intéressant livret rédigé par Rinaldo Alessandrini lui-même, qu’on se donnera la peine de lire avant audition, l’interprète précise : « Une unique suite pour clavecin, contenue dans une autre source, le manuscrit dit Oldham, nous montre un modèle construit sur la succession d’une allemande, de deux courantes et d’une sarabande, d’une manière en tous points conformes à la structure de la majorité des suites de Froberger, où la gigue occupe à chaque fois une place imprévisible et irrégulière. Puiser aux manuscrits Bauyn et Parville signifie donc aussi « construire » sa propre suite. Les manuscrits offrent la possibilité d’ajouter au groupe des danses canoniques de nombreuses galanteries. » Ce récital est élaboré par Alessandrini dans un certain contexte de liberté structurelle ; il explique cependant qu’il s’est inspiré de l’édition de la musique de clavecin de Louis Couperin établie par Davitt Moroney, ce qui lui permet de se lancer dans une analyse de « la linguistique » du compositeur, texte qui fait état de questions liées au vocabulaire musical du temps et qui intéressera les théoriciens.

Le claveciniste, organiste, pianiste, chef d’orchestre et chef de choeur réputé qu’est Rinaldo Alessandrini, né à Rome en 1960, n’est plus à présenter. Fondateur du Concerto Italiano, il est à la tête d’une production discographique importante où Haendel, Scarlatti, Vivaldi ou Bach voisinent avec Monteverdi ou Mozart. Sa carrière a été couronnée par de nombreuses distinctions depuis une trentaine d’années. Son premier récital de musique française, qui nous est ici proposé, risque de ne pas recevoir les mêmes éloges. L’impression générale qui s’en dégage est celle d’une certaine monochromie, dont les côtés lisses semblent peu investis et entraînent l’auditeur dans un univers qui finit par lasser. La part imaginative que l’on attend devrait s’accompagner d’un style et d’une allure de transparence et de profondeur associées, mais les nuances semblent souvent gommées dans un contexte où l’expressivité ne semble pas faire place à la vie, au charme et à la finesse souhaitées. Le reproche ne se situe pas au niveau de la conception ni du toucher, distingué et harmonieux, mais au niveau de l’esprit qui devrait magnifier la couleur, les contrastes et la légèreté. On ne les trouve que trop peu souvent. Alessandrini, malgré ses qualités techniques intrinsèques, signe ici une version qui ne peut rivaliser avec les références récentes que l’on connaît, notamment avec celle, magistrale, de Christophe Rousset, parue l’an dernier chez Harmonia Mundi.

Son : 8  Livret : 9  Répertoire : 9   Interprétation : 7

Jean Lacroix

 

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