Demi-disque mais confrontation éditoriale intéressante 

par

Arnold Schoenberg (1874-1851) : Concerto pour violon Op.36 ; Johannes Brahms (1833-1897) : Concerto pour violon en ré, Op.77. Jack Liebeck, violon ; BBC Symphony Orchestra, Andrew Gourlay. 2019. Livret en anglais. 77’15’’. Orchid Classics ORC100129

Peu connu sur cette rive de la Mer de Nord et dans les pays latins, le Britannique Jack Liebeck mène une belle carrière dans le monde anglo-saxon. Auteur d’une déjà solide discographie et en particulier d’une intégrale des oeuvres concertante de Max Bruch pour le label Hyperion, il nous offre un nouveau disque qui confronte deux partitions majeures du répertoire. C’est par ailleurs la première fois que les concertos pour violon de Schoenberg et Brahms se retrouvent sur un même album. Si le Concerto de Brahms est un tube magistral et archi rabâché, il en va tout autrement de celui de Schoenberg qui reste à la marge du répertoire et est presque exclusivement pratiqué par des violonistes à forte personnalité comme Hilary Hahn, Kolja Blacher ou Christian Tetzlaff. 

Dans le livret, le violoniste explique que la présence des deux concertos sur cet album trouve son origine dans un souvenir familial. Le Concerto de Schoenberg fut composé au début des années 1930, aux Etats-Unis, par un compositeur ayant fui le nazisme. Cet exil lui rappelle celui de son grand père, violoniste et juriste quittant à cette même époque l’Allemagne pour l‘Afrique du Sud. Ce même grand-père qui lui parla à de nombreuses reprises du Concerto de Brahms. Pour Jack Liebeck, le couplage était ainsi trouvé ! 

L’interprétation du Concerto de Schoenberg est exemplaire. Fuyant l’aridité du dodécaphonisme, le violoniste impose un ton narratif et des couleurs chatoyantes. Rompu aux plus exigeantes musiques de notre temps, le BBC Symphony Orchestra est un accompagnateur concentré sous la baguette compétente d’Andrew Gourlay. Certes Hilary Hahn/ Esa-Pekka Salonen (DGG) et Kolja Blacher/Markus Stenz (Oehms) vont encore plus loin, mais cette lecture est une incontestable réussite. 

Il est toujours difficile de noter une interprétation qui cherche courageusement à sortir des voies tracées et habituelles. Dès les premières notes du Concerto de Brahms, on est frappé par la lenteur des tempi et par l’inertie dramatique de l’orchestre et du soliste. Le violon se veut hostile à toute virtuosité gratuite mais le ton sonne trop neutre et le BBC Symphony Orchestra dénervé tombe dans la routine. La cadence de Fritz Kreisler, menée avec entrain et musicalité, ne compense pas notre réserve. L’adagio prolonge ce ressenti distancié et ennuyeux avant que le dernier mouvement s’arrache enfin au panache. Si l’expérience d’une approche moins gratuitement virtuose pouvait être intéressante, la réalisation nous laisse dubitatif ! 

On retient de ce disque l’interprétation du Concerto de Schoenberg, magnifiée par un son de démonstration. La concurrence n’étant pas énorme, elle se fait une place dans un contexte raréfié. Hélas, les carences du Concerto de Brahms nous empêchent de recommander ce disque dans sa globalité. 

Son : 10 – Livret : 9 – Répertoire : 10 – Interprétation : 9 pour Schoenberg/5 pour Brahms 

Pierre-Jean Tribot

 

 

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