La musique vocale d’Arnulf Herrmann chez Musica Viva

par

Arnulf Herrmann (1968-) : Drie Gesänge Am Offenen Fenster, Tour De Trance . Anja Petersen ; Björn Lehmann ; Bavarian Radio Symphony Orchestra direction : Stefan Asbury et Pablo Heras-Casado. 53’33 – 2023 – Livret : allemand et anglais. BR Klassik. 900641. 


BR Klassik, le label de la radio bavaroise, consacre l’épisode 41 de Musica Viva, sa série à tête fouineuse fondée dès 1945 à Munich par Karl Amadeus Hartmann (marxiste engagé, émigré intérieur pendant la période nazie et créateur de huit symphonies), à la musique vocale d’Arnulf Herrmann, compositeur et pianiste né à Heidelberg, formé à Munich, Dresde et Paris (auprès de Gérard Grisey et Emmanuel Nunes), puis à Berlin, et auteur de musique de chambre et pour ensemble, en plus de pièces pour grand orchestre et de deux opéras (Wasser, de 2012 et Der Mieter, de 2017, basé sur le roman kafkaïen Le locataire chimérique de Roland Topor – celui-là même qui inspire à Roman Polanski son inquiétant film Le locataire). Les Drie Gesänge Am Offenen Fenster (trois chants à la fenêtre ouverte), ici enregistrés lors de la première en octobre 2014, sont ultérieurement intégrés à ce deuxième opéra, à des passages clés, à l’ambiguïté (temporelle) calculée, où musique et poésie (Händl Klaus) se relaient autant qu’elles se renvoient la balle – ponctuation suggestive et métrique répétitive pour figures concises et leurs interactions.

La deuxième pièce du disque, Tour de Trance, est d’abord présentée dans sa version pour piano (Björn Lehmann) et soprano (Anja Petersen), ensuite largement étendue (cinq fois plus longue, en quatre mouvements enchaînés, dont seul le dernier répond explicitement à la partition initiale) dans sa réécriture pour orchestre entamée trois ans plus tard. Des deux visions musicales bâties à partir du texte de Monika Rinck, la première développe une atmosphère solennelle voire sinistre (les graves frappées au clavier, laissées ensuite au bon vouloir de la résonance), qui n’est rien face à l’abord, lourd et menaçant, du premier mouvement de la seconde (Igor Stravinsky cligne des yeux derrière le miroir sans tain) : Herrmann se donne ici le temps d’un développement (seules les deux dernières parties sont en relation directe avec le poème), jamais vraiment au repos, où les événements musicaux se succèdent, plein et exigeant (le tour de force de Petersen dans Poisoning Time). Un disque curieux, à approfondir.

Son : 7 – Livret : 8 – Répertoire : 7 – Interprétation : 8

Bernard Vincken

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