L'alto en miroir avec Amihai Grosz
William Walton (1902-1983) : Concerto pour alto (version révisée de 1962) ; Bohuslav Martinů (1890-1959) : Rhapsody-Concerto pour alto et orchestre. Amihai Grosz, alto ; Berliner Philharmoniker, direction : Sir Simon Rattle, Matthias Pintscher. 2017 et 2023. Livret en anglais et allemand. BPHR 24049
Suite des parutions digitales des Berliner Philharmoniker mettant en avant leurs solistes avec cette fois un focus sur l'alto avec Amihai Grosz, l’un des deux chefs de pupitre de la phalange berlinoise.
Le choix s'est porté sur deux œuvres pas si fréquentes du répertoire, deux partitions pas si éloignées de ton avec une sorte de nostalgie commune qui se déploie avec une forme d’économie de moyens, mais qui subjuguent le timbre de l’alto. De Walton, on aime à la fois la beauté des mélodies et la motorique, une constante chez ce compositeur. De Martinů, on savoure cette élégance de l'orchestration qui se déploie avec le raffinement poétique d’un paysage d’automne comme une tragédie de l’exil.
Dans ces deux partitions Amihai Grosz est magistral. Il allie la technique assurée et la musicalité sensible mais jamais démonstrative. L’altiste est exceptionnel dans l'œuvre de Bohuslav Martinů dont il rend toute la richesse de la narration en cernant les contrastes et les inflexions du discours musical. Il est ici parfaitement secondé par Matthias Pintscher qui dirige en compositeur, se concentrant sur la beauté pure de l'écriture orchestrale et refusant tout folklore ou nostalgie tchèque. L'interprétation du concerto de Walton est également une grande réussite par les mêmes qualités du soliste : à la fois sensible et impactant. Dans cette musique, les Berlinois n’ont peut être pas la rudesse énergique des phalanges britanniques, mais les teintes grisées des pupitres sont un bel atout sous la direction experte de Simon Rattle.
Dans les deux cas, ces partitions ne sont pas les plus représentées au répertoire, en particulier le Martinů qui est une œuvre de “spécialiste” en emphase avec l’art du compositeur. Cet album purement numérique est ainsi particulièrement bienvenu.
Son : 10 Notice : 10 Répertoire : 9 Interprétation : 9/10
Pierre-Jean Tribot