Le Belgian National Orchestra sous la baguette de Lionel Bringuier : peuvent mieux faire

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Les débuts à la tête de l’Orchestre National de Lionel Bringuier étaient attendus avec beaucoup d’intérêt, tant la réputation de ce jeune chef français -qui occupa la prestigieuse position de chef de l’Orchestre de la Tonhalle de Zürich pendant quatre saisons et avec lequel il enregistra pour DG une intégrale Ravel généralement bien reçue (DG)- jouit d’une flatteuse réputation.

C’est justement par la rare Ouverture de Shéhérazade de Ravel que s’ouvrit ce concert qui vit tous les exécutants (chef et soliste compris, sauf les vents) garder le masque du début à la fin, les musiciens de l’orchestre respectant une distance moindre qu’à une certaine époque, mais néanmoins bien réelle avec chaque musicien des cordes disposant de son propre pupitre et les vents séparés de bien un mètre cinquante.

Utilisant une baguette assez longue, Bringuier connaît manifestement parfaitement ses partitions et conduit avec clarté, souplesse et une précision gestuelle aussi utile à l’orchestre qu’à la salle. 

Après une exécution très correcte mais sans relief particulier de la partition de Ravel, les choses sérieuses commencèrent avec le Deuxième Concerto pour piano de Liszt, où le pianiste Jean-Yves Thibaudet fit forte impression par son fini pianistique irréprochable, son sens du drame et son subtil art du phrasé. Même si la sonorité du soliste n’est pas particulièrement colorée, son jeu est un vrai modèle de raffinement et de virtuosité aisée, sans rien de superficiel ni d’agressif. Bringuier et le BNO se montrèrent des partenaires aussi attentifs qu’enthousiastes.

C’est par la Shéhérazade de Rimsky-Korsakov, irrésistible et inoxydable tube du répertoire orchestral, que s’achevait le concert. Bien sûr les tournures orientalisantes, l’invention mélodique et le fabuleux sens de l'orchestration du compositeur russe garantissent à coup sûr le succès de cette oeuvre auprès du public. Au cours des quatre mouvements dirigés avec autant d’autorité que de sobriété mais sans magie particulière par Bringuier, plusieurs sections de la formation bruxelloise se montrèrent à leur avantage dans ce qui est un véritable concerto pour orchestre, à commencer par les cuivres et les vents, invariablement très beaux de sonorité et pleins de personnalité. On peut en dire autant de la percussion et des cordes graves (à commencer par de belles interventions du violoncelle solo qui s’était déjà très positivement fait remarquer dans le concerto de Liszt). La palme doit cependant aller à la très fine et séduisante Princesse incarnée par la Konzertmeister Misako Akama, une recrue de choix dont on peut espérer qu’elle incitera ses collègues violonistes -qu’on a déjà connus plus inspirés- à davantage soigner leur sonorité, pas toujours des plus belles. Quant au chef, s’il maîtrise parfaitement son sujet et évite tout clinquant inutile, on ne peut s’empêcher de penser qu’il est capable de bien mieux encore. Bref, interprétation très correcte du côté du BNO comme de Lionel Bringuier, mais qui laisse un peu sur sa faim. Orchestre et chef firent certes un malheur à l’applaudimètre, mais on aimerait bien les réentendre au meilleur de leur forme.

Bruxelles, Bozar, le 6 novembre 2021.

Patrice Lieberman

Crédits photographiques : Simon Pauly

 

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