Les suites pour violoncelle par Sonia Wieder-Atherton à Saint Pierre aux Nonnains de Metz

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Pour accompagner la sortie de ses disques des Six suites pour violoncelle de Bach, Sonia Wieder-Atherton donna deux concerts à la basilique Saint Pierre aux Nonnains de Metz les 6 et 7 novembre 2024. La violoncelliste aura attendu d’être dans sa soixantième année pour oser l’interprétation de cette somme de profondeurs et de légèreté. Le choix d’un ancien lieu de culte, donc d’un lieu propice à l’écoute, au silence et à l’intériorité fut un choix judicieux pour cette musique de l’intime. 

Cette bible des violoncellistes, comme ce recueil est si justement surnommé, reste pour les amateurs d’une insondable beauté. Utilisant une virtuosité technique pour l’expression de la grande mélodicité de chacun de ses mouvements, comme la simplicité apparente du prélude de la première, ou le raffinement de la sarabande de la cinquième suite, elle semble exprimer le for intérieur de son auditeur. 

Le programme de Sonia Wieder-Atherton se déroula donc sur deux soirées. Le 6 novembre, elle joua les suites numéro 4, 5 et 1 et le 7 novembre, les 3, 2 et 6.

La suite numéro 4 commence par un prélude aux notes graves et boisées, proches de celles du théorbe, pour venir à des sonorités plus légères dans les mouvements dansants. La suite numéro 5, suit d’ailleurs ce mouvement ascensionnel. Son exécution, révélant dans ses difficultés l’agile doigté de Sonia Wieder, est un parfait exemple de la monté vers la joie de ces suites, Et si le jeu de Sonia Wieder-Atherton débuta par sonner un peu sec, il se fluidifia avec le temps pour être d’une évidence sobre. Le parallélisme entre la sécheresse arrivant à une grande liberté dans l’exécution et la profonde intériorité aboutissant à une grande joie dans la composition vient rapidement à l’écoute de Sonia Wieder-Atherton. 

La rigueur de l’artiste dans l'exécution des préludes frôlait parfois à l’excès de technicité et encornait leurs charmes, comme dans la cinquième suite. Elle ne manquait cependant jamais de les faire respirer, de leur insuffler de la joie, et même, comme dans la célèbre première suite, dont elle bissa le premier menuet, d’arriver à une sorte d’extase intérieur. La délicatesse avec laquelle elle fit mourir la note dans la sarabande de la troisième et la profondeur du son dans la deuxième suite n’échappèrent pas non plus au public. 

Si le concert du 6 novembre dépeignit une gradation vers la joie, celui du 7 semblait illustrer un duel intérieur pour y arriver. Parallélisme parfait entre les concerts, la sixième semblait être un pendant à la première suite. Ainsi la première retenait toutes ses difficiles beautés en elle, et la sixième dans son caractère plus baroque les exposait. 

A mi-chemin entre la fraîcheur aiguë du violon et la profondeur grave de la contrebasse, le violoncelle est l’instrument de l’intériorité, de l’expression de l’âme comme dirait Bach. Il faut avoir son génie pour faire danser et méditer son for intérieur, et ainsi le faire arriver à une jubilation intime, comme le donnait à entendre si bien Sonia Wieder-Atherton dans ces deux soirées. 

Metz, Cité musicale, les 6 et 7 novembre 2024

Andreas Rey

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