Les symphonies de Beethoven par Jukka-Pekka Saraste: assez ou encore ?

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Ludwig van BEETHOVEN (1770-1827) :Symphonies n° 1 à 9. Laura ALKIN (soprano), Ingeborg DANZ (alto), Maximilian SCHMITT (ténor), Tareq NAZMI (basse), Orchestre symphonique de la WDR de Cologne, dir.: Jukka-Pekka SARASTE. 2017-2018-DDD-5h44'-Textes de présentation en anglais et allemand-Profil Günter Hänssler PH 18066 (5 cd).

Les symphonies de Beethoven sont sans doute le corpus le plus fréquenté et enregistré de la musique symphonique universelle ; il n'est que peu de chefs de renom à ne pas s'être prêtés à l'exercice. C'est aujourd'hui le tour du Finlandais Jukka-Pekka Saraste qui avait impressionné au début de sa carrière par des Sibelius fulgurants mais avait ensuite connu une relative éclipse à laquelle cette nouvelle production mettra peut-être fin. A la tête de l'orchestre de la radio de Cologne depuis 2010, il nous livre un ensemble de bonne tenue, à mi-chemin entre la vision romantique des « grands anciens » et la révision plus décapante des Harnoncourt, Gardiner et autres Hogwood, une voie médiane déjà suivie par David Zinman et Simon Rattle, par exemple. Ainsi, les tempos sont plutôt allants, les accentuations marquées, la respiration assez courte, la lisibilité totale entre les différents pupitres, les rubatos absents, les vibratos réduits à leur plus simple expression. Si les « petites » symphonies (1 et 2 surtout) peuvent faire illusion, celle-ci se dissipe dès les premiers accords de l'Héroïque, menée de manière bien prosaïque. Le parti-pris de rigidité métronomique, de tempos rapides, d'accords répétés à l'identique, de propreté clinique enlève toute place au suspense, à l'émotion, à la rêverie, à la révolte, bref à tout ce qui nous rend ces chefs-d'oeuvre indispensables. Par contre, certaines coquetteries (piano subito au début de la Pastorale, par exemple) nous semblent inutiles. Ailleurs, le caractère « bousculé » de l'orage de la 6ème laisse ici la place à une charge de cavalerie trop bien ordonnée. Pour l'essentiel, nous nous retrouvons devant des lectures sans grande subtilité, aux effets on ne peut plus attendus, même si les sonorités sont parfois de toute beauté (les bois dans l'Héroïque, les cordes dans la 7ème). Quelques réussites quand même: 1er mouvement de la 7ème, assez grandiose et à la respiration naturelle, 3e mouvement de la même, d'un parfait classicisme, 2e de la 8ème, bonhomme mais non sans délicatesse, finale de la 5ème plein de vaillance et qui ne s' « effondre » pas sur lui-même. A noter aussi la 9ème qui, en 62 minutes à peine, constitue sans doute l'une des lectures les plus rapides du super-tube beethovénien, ce qui n'exclut pas des longueurs génératrices d'ennui, dues paradoxalement à des tempos trop enlevés et trop peu contrastés, en particulier dans un mouvement lent rendu presque éclopé et asphyxié par un tel traitement. Et le finale rejoint la triste cohorte des grands « loupés » de la discographie de cette page qui, pour être célébrissime, n'en reste pas moins des plus ardues à restituer avec bonheur. Bref... à peu de choses près, une intégrale de plus, oserions-nous dire. Pour un cycle assez récent qui puisse se mesurer aux légendaires Furtwängler, Mengelberg, Schuricht, Cluytens, Jochum ou Toscanini, pour n'en citer que quelques-uns, essayez Barenboim en 1999, très inspiré en compagnie de la Staatskapelle de Berlin, voire son « remake » avec le West-Eastern Divan Orchestra.

Bernard Postiau

Son: 9-Livret: 8-Répertoire: 10-Interprétation: 7

 

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