Les nominations aux International Classical Music Awards 2022

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Le jury des International Classical Music Awards publie la liste des enregistrements audio et vidéo nominés aux ICMA 2022. Au total, 377 productions audio (+12 par rapport à 2021) et vidéo de 129 labels (+7 par rapport à 2021) ont été nominées pour cette édition 2022. 

Parmi les nominations de cette année figurent de nombreux solistes, ensembles, chefs d'orchestre et orchestres de renom, ainsi que de nombreux jeunes musiciens, dont beaucoup font leur entrée dans les listes des nominés des ICMA. 

Pour être nominée, une production doit être proposée par au moins deux membres du jury. Avec 21 nominations, le label Alpha occupe la première place. Il est suivi par les labels BIS et Naxos (19 nominations chacuns).

Les finalistes seront connus le 14 décembre. Les noms des lauréats seront révélés le 20 janvier 2022.

La cérémonie de remise des prix et le concert de gala se dérouleront à la Philharmonie de Luxembourg le 21 avril 2022, avec l’Orchestre philharmonique de Luxembourg dirigé par l'un des lauréats 2022.

La liste complète des lauréats est en ligne sur le site des ICMA : www.icma-info.com

 

A Genève, François Dumont ouvre brillamment le Festival Chopin   

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Au cours de chaque automne a lieu à Genève un Festival Chopin qui se déroule en trois ou quatre lieux différents. Pour une 24e édition depuis 1997, son infatigable présidente, Aldona Budrewicz-Jacobson, sollicite à nouveau le concours du pianiste lyonnais François Dumont qui, outre le concert d’ouverture, dirige une masterclass durant quatre jours. 

Le 11 novembre au Conservatoire de Musique, il intitule son programme ‘Chopin et le charme de ses fantaisies’ et le commence par la redoutable Polonaise en la bémol majeur op.61 dite Polonaise-Fantaisie, où il dilue dans le jeu de pédale les longues cadences en arpèges en leur prêtant un tour énigmatique. Mais l’indication A tempo giusto permet d’édifier la polonaise proprement dite par le martellement des octaves qui dynamise la progression, tout en ménageant les contrastes d’éclairage jusqu’à un Poco più lento aux couleurs tamisées. Mais la liquidité des trilles en tierces ramène le caractère héroïque du début pour conclure par une péroraison grandiose. A titre d’intermède s’y enchaîne la célèbre Fantaisie-Impromptu en ut dièse mineur op.66, développée avec une vélocité ahurissante qui s’apaise avec le moderato cantabile traité ici comme l’une de ces arie de Bellini modérément ornementée que l’on pouvait entendre aux ‘Italiens’, avant que ne reprenne le babillage du début. Le rideau semble se refermer avec la Fantaisie en fa mineur op.49 dont le Tempo di marcia est buriné à la pointe sèche par des accords acérés que diluent les formules en arpèges faisant avancer le discours vers un agitato pathétique, tempéré fugacement par un Lento sostenuto totalement intériorisé.

Mitridate à la Philharmonie de Paris

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Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Mitridate Re Di Ponto. Michael Spyres, Mitridate ;   Julie Fuchs, Aspasia ;  Sabine Devieilhe, Ismene ;  Elsa Dreisig, Sifare ;  Paul-Antoine Benoit-Djian, Farnace ;  Cyrille Dubois, Marzio ; Adriana Bignagni Lesca, Arbate. Les Musiciens du Louvres, Marc Minkowski. 2021- Livret en français, anglais, allemand - Texte chanté en italien. 3 CD ERATO 0190296617577

Voyage et rêverie : Debussy par Jean-Yves Thibaudet

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Ce récital monégasque de Jean-Yves Thibaudet était prévu en novembre 2020. Du fait de la pandémie,  il a été reporté à cette année. C'est un bonheur de retrouver l’un des pianistes majeurs d’aujourd’hui dans un programme très intense, les deux livres des Préludes de Claude Debussy dont il a gravé une excellente intégrale pour Decca. 

Jeune sexagénaire,  Jean-Yves Thibaudet s'approprie la partition et il nous invite au voyage et à la rêverie. Le pianiste réunit trois qualités qui rendent son style irremplaçable : densité, expressivité et sensualité. Chaque pièce est  traitée comme une œuvre à part entière avec des univers évocateurs différents. Les mains se laissent guider par un sens narratif qui exploite le potentiel expressif de chaque scène. La sensation qu'il recueille et transmet lui permet d'incarner ses visions dans toute leur chair. On passe de la nature à l'exotisme , de l'antiquité aux mondes imaginaires, de la profondeur océanique de la "Cathédrale engloutie", à la tornade que souffle "Ce qu'a vu le vent d'ouest". Le piano de Thibaudet peut flatter l'oreille, mais il sait aussi fouetter le sang et réchauffer le coeur. 

Elle y a cru, nous y croyons : Madama Butterfly à Avignon

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Pauvre petite Cio-Cio-San, pauvre et pathétique Mrs Pinkerton, pauvre Madame Butterfly, pauvre petit papillon épinglé, broyé. En quelques appellations, le destin d’une héroïne tragique. Là-bas à Nagasaki, dans un Japon misérable, à peine âgée de quinze ans, elle est vendue à un officier de marine américain, « mariée » pour 999 ans, avec possibilité pour le « mari » de résiliation mensuelle du contrat. Elle y croit. Elle renonce à sa famille, à sa religion. Il part. Elle l’attend. Il revient, mais avec sa « femme américaine », légitime, officielle, désireux de reprendre l’enfant né de leur union. Elle se suicide avec le sabre de samouraï de son père, sur lequel on peut lire : « Il meurt avec honneur celui qui ne peut vivre avec honneur ».

Elle y a cru, nous ne cessons d’y croire, encore et encore émus, depuis la création de l’opéra en 1904. Un mélodrame ? Oui, mais bien plus que cela. Une enfance abusée, un contexte culturel, religieux et social, la morgue indifférente et « de bonne foi tranquille » de ceux qui sont les plus forts, la vénalité, l’amour pur, naïf, sans calcul, la tendresse, des touches d’humour, une tragédie irrésistible. Et surtout une partition si juste dans la façon dont elle dit le drame, dont elle est le drame. Ah ! ces thèmes pucciniens qui annoncent, qui exposent, qui rappellent. Nous entendons, nous ressentons, nous vibrons avant que les mots ne surgissent. Et l’on a beau connaître l’œuvre, l’avoir écoutée et écoutée, savoir à quel moment l’émotion est au rendez-vous, elle nous atteint chaque fois, bouleversante. 

Rachmaninov et Elgar : grand bain romantique au Nouveau Siècle de Lille

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Intitulée Grand romantisme, la soirée rapprochait deux œuvres de la toute fin du XIXe siècle, qui assurèrent la re(con)naissance de leur auteur : les Variations Enigma d’Edward Elgar lui acquirent la gloire, le second Concerto de Rachmaninov le sauva de la dépression. Pour s’en tenir à un complet programme de variations, on aurait pu songer à celles sur un caprice de Paganini, du même compositeur, ou dans le répertoire du dernier quart de siècle convier par exemple les Variations symphoniques de Franck, les « Variations Haydn » de Brahms, les Symfonické variace z písně de Dvořák, tout cela certes moins ardent. Le mince format d’une heure dix ne le permettait guère, mais avait en tout cas fait salle comble au Nouveau Siècle.

Sir Adrian, un grand maestro anglais, d’ailleurs spécialiste d’Elgar, estimait que Rachmaninov « pourrait se désigner comme le dernier romantique, car son œuvre était européenne plutôt que russe [...] son style était celui de Tchaïkovski plutôt que Moussorgski » (Boult on Music, Toccata, Londres 1983). On retrouvait en effet dans la direction de Lionel Bringuier une lisibilité, une clarté de ton qui accréditerait ce jugement. Après le glas du clavier, on constatait combien les cordes lilloises façonnaient avec pureté le premier thème, sans épanchement douteux ni dérive passionnelle. Le lyrisme du second thème se présentait chaste, aristocratique, dans une veine « russe blanc ». Une lecture sans grandiloquence et sans histoire de ce Maestoso, quitte à ce que le ton épique fît parfois défaut sous une baguette efficace mais non extravertie. Ce concerto enrôlait Lukáš Vondráček (Premier Prix du Concours Reine Elisabeth en 2016) qui lui prodigua son zèle mais pas toute la puissance requise pour rivaliser avec un fourreau d’une cinquantaine de cordes. L’osmose attendue des moments de douceur était-elle vraiment au rendez-vous de l’Adagio sostenuto ? Lequel profita toutefois d’une cantilène lumineuse, soignée par des bois saillants (clarinette notamment). S’y inscrivait un soliste capiteux malgré une certaine dureté qui correspondait mieux aux parades lisztiennes du volet più animato. En revanche, le staccato du pianiste tchèque n’apparaissait pas des mieux galbés et sonores au début de l’Allegro scherzando, qui nécessite une redoutable alliance de vigueur et de fluidité. Les vaporeuses sinuosités du second thème (altos et hautbois) tendirent à s’enliser plutôt qu’à s’exhaler, sans que le piano parvînt à le vivifier dans ses reprises. Ce que le Finale arbore de fier et péremptoire se montra sous un jour autoritaire (une percussion au cordeau), vers une coda non avare de panache à l’emporte-pièce (rien n’objecte à ce coup de sang slave). L’enthousiasme du public rappela l’invité qui gratifia le public d’une rêverie chopinienne dans l’âme.

Renouveau de la musique instrumentale et sacrée à la Cour d’Espagne à la fin du Baroque

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The Royal Chapel of Madrid, Sacred Music after the Great Fire of 1734. Francesco Corselli (1708-1778) : Deuxième Lamentation pour le Jeudi Saint. Cantate ¡Oh, qué pena!. Cantate de Noël Pastores que habitáis. Salve Regina. Concertino a 4. Domenico Porretti (1709-1783) : Ouverture en ré majeur. José Lidón (1748-1827) : Première Lamentation pour le Mercredi Saint. María Espada, soprano. Javier Ulises Illán, Ensemble Nereydas. Octobre 2020. Livret en français, anglais, allemand, espagnol ; texte des chants en langue originale traduite en anglais. TT 73’12. Pan Classics PC 10427

L’Orfeo de Monteverdi par Alarcón : un éblouissement

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Claudio Monteverdi (1567-1643) : L’Orfeo. Valerio Contaldo (Orfeo), Mariana Florès (La Musica, Euridice), Giuseppina Bridelli (La Messaggiera), Ana Quintans (La Speranza, Proserpina), Alejandro Meerapfel (Plutone), Salvo Vitale (Caronte), Nicholas Scott (Pastore I, Spirito III, Eco), Alessandro Giangrande (Pastore III, Apollo), Carlo Vistoli (Pastore II), Julie Roset (Ninfa), Matteo Bellotto (Pastore IV), Philippe Favette (Spirito) ; Chœur de Chambre de Namur ; Cappella Mediterranea, direction Leonardo García Alarcón. 2020. Notice en français, en anglais et en allemand. Livret en langue originale, avec traductions française et anglaise. 106.21. Un album de deux CD Alpha 720.