Pasticcio en l’honneur de Pietro Torri, brillant pourvoyeur de la Cour de Bavière

par

Trastulli & Arias. Divertissement pour la Cour de Bavière. Pietro Torri (1650-1727) : trastulli et airs d’opéra. Cristina Grifone, soprano. José Coca Loza, basse. Paolo Pandolfo, viole de gambe. Ensemble Musica Fiorita, Daniela Dolci, clavecin et direction. Septembre 2019. Livret en allemand et anglais ; paroles en italien et traduction en allemand. TT 77’03. Pan Classics PC 10417

Originaire de la région du Lac de Garde, Pietro Torri resta fidèle pendant un demi-siècle à Maximilian Emanuel de Bavière (1662-1726) qu’il suivit dans ses gloires (rappelons qu’il gouverna les Pays-Bas espagnols), comme dans ses revers et ses exils. Les goûts mondains et artistiques du Prince-Électeur stimulèrent le compositeur qui à son retour à Munich en 1715 alimenta la ville en opéras, de même qu’il avait prodigué maints trastulli (divertissements) lors de sa période bruxelloise dans les années 1690. Parmi la soixantaine de ces arias conservées dans quatre volumes de la Bibliothèque d’État de Bavière, le disque a sélectionné un panel représentatif. Le reste du programme s’approvisionne à des opéras créés en l’honneur d’événements liés à Maximilian Emanuel, tels les noces de son fils Charles-Albert (le furieux A turbar l’ondoso regno extrait d’Adelaide) ou la naissance de sa petite-fille (Su spirti venite tiré d’Amadis di Grecia). Mais aussi à des cantates festives (Figli de monti, Gia dall’ Isser ameno) écrites à l’occasion de joutes équestres.

Daniela Dolci eut connaissance des trastulli en 2009 et les intègre ici dans un ingénieux pasticcio dont elle définit l’intrigue par ce sujet : « un couple d’amoureux empêchés de s’unir par les conventions sociales ». Courroux de l’amant, peine de l’aimée, souvenirs arcadiens, regrets, interlude (musiques de tournoi), allégorie de la séparation, espoir du renouveau, jalousie, crainte de la trahison, accomplissement. À ce concept bien pensé, la viole de Paolo Pandolfo entretoise quelques transitions instrumentales.

Un florilège remarquablement interprété. On s’en convainc dès le premier air enfiévré par la voix d’airain de José Coca Loza, qui s’empare ensuite avec éclat et vaillance de ce scénario. La jeune basse bolivienne trouve en Cristina Grifone une partenaire sensible, au timbre clair et pointu, éblouissante dans Vincitore che vinto ti rendi, et ailleurs pliant charme et ingénuité à son rôle de circonstance. Émané des inépuisables classes de la Schola Cantorum de Bâle, l’ensemble Musica Fiorita fournit à ce théâtre un accompagnement tout de brio, ranimant la flamme italienne dont s’honorait la Cour du « Prince au gilet bleu ». 

Son : 9 – Livret : 9 – Répertoire : 9 – Interprétation : 10

Christophe Steyne

 

 

 

 

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