Kissin et Volodos : deux maîtres du piano d’aujourd’hui à Flagey
En l’espace de septante-deux heures à peine, Flagey permettait aux amateurs de piano d’entendre deux des plus réputés pianistes d’aujourd’hui en la personne d’Evgeny Kissin et d’Arcadi Volodos.
Jeunes quinquagénaires nés et formés dans la défunte URSS -quittée ensuite pour l’Ouest -par des professeurs à la rigueur légendaire, les deux artistes n’ont en fait qu’assez peu de points communs. D’ailleurs, les entendre à si peu de temps d’intervalle amène à se demander s’il existe vraiment une école russe, pas tant dans l’exigence technique que dans l’approche interprétative.
Ancien enfant prodige, s’essayant volontiers à la composition comme à la poésie, Kissin est un pianiste à la technique digitale souveraine, au jeu impeccablement construit et puissant. Lorsqu’il pénètre sur la scène du Studio 4 de Flagey -où, la salle s’étant révélée trop petite pour accueillir tous les mélomanes désireux d’entendre ce trop rare visiteur dans nos contrées, quelques dizaines de chaises supplémentaires ont été installées- Evgeny Kissin s’installe calmement au piano et entame son récital au programme intéressant et varié par la célébrissime Toccata et fugue en ré mineur de Bach dans la transcription de Tausig. Dans la Toccata, Kissin réussit à faire tonner le Steinway de Flagey comme un orgue. Si l’on regrette par moments quelques duretés à la main droite, la puissance sonore déployée est franchement ébouriffante. Dans la Fugue, on apprécie le superbe staccato comme la maîtrise des gradations sonores. Malgré un emploi généreux de la pédale, les lignes mélodiques sont toujours claires.