À l’OSR, Mozart pour un retour à la vie ! 

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Samedi dernier, le 6 juin, le Victoria Hall a rouvert ses portes pour accueillir l’Orchestre de la Suisse Romande et son chef titulaire, Jonathan Nott. Mais les normes de sécurité et les distances sociales imposées par les restrictions liées à la pandémie du Coronavirus ont limité la jauge de salle à 250 personnes. Sur scène, l’effectif est réduit à trente musiciens qui proposent un programme Mozart d’une durée d’une heure sans entracte, offert gratuitement au public les 6, 8, 16 et 18 juin. 

Quelle surprise de se retrouver dans cette salle volontairement clairsemée au parterre et dans les loges où ne sont admis que deux spectateurs mais où se glisse discrètement Martha Argerich, amie très proche de Nelson Goerner qui est le soliste du 23e Concerto en la majeur K.488. Tout sourire, en tenue décontractée comme ses instrumentistes, Jonathan Nott en imprègne l’Introduction du plaisir de faire de la musique dans un esprit chambriste, allégeant les fins de phrase tout en nuançant le discours. Une fois que l’oreille s’est adaptée à cette sonorité si particulière que produit la distance entre les pupitres dans un lieu rempli au quart, l’on se concentre sur le pianiste au jeu perlé et à l’articulation claire donnant une patine brillante au discours rapide qui culmine dans une cadenza volubile. Par contre, l’Adagio exprime une profonde tendresse en répondant au dialogue de la flûte et de la clarinette, tandis que le Finale est enlevé avec un brio époustouflant. Devant l’enthousiasme du public, Nelson Goerner égrène avec une touchante nostalgie une page de son compatriote Carlos Guastavino, Bailecito.

Avec la même énergie indomptable, Jonathan Nott et la formation réduite s’attaquent à la Symphonie ‘Jupiter’ avec des traits à l’arraché qui confèrent une noble grandeur à l’Allegro vivace, sensibilisé à la moindre nuance d’expression. Abordé à tempo plutôt rapide , l’Andante cantabile laisse affleurer les larmes sous le dessin volubile des cordes en sourdine ; mais l’appui sur le legato des vents fait surgir une anxiété que bannira le Minuetto allant de l’avant avec une assurance modérée par le Trio aux accents rustiques volontiers ironiques. Et le Molto allegro final tient du Presto exubérant qui développe avec une logique implacable l’entrelacs du fugato pour conclure brillamment. Et le public ovationne le plateau avec la joie d’avoir entendu réellement son orchestre dans une salle de concert !      

Paul-André Demierre

Genève, Victoria Hall, le 6 juin 2020

Crédits photographiques : OSR

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