Le rendez-vous manqué de Semyon Bychkov avec la Deuxième Symphonie de Mahler 

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Gustav Mahler (1860-1911) :  Symphonie N°2 en ut mineur « Résurrection ». Christiane Karg, soprano ;  Elisabeth Kulman, mezzo-soprano ; Prague Philharmonic Choir, Czech Philharmonic Orchestra, direction :  Semyon Bychkov. 2018. Livret en anglais. 86’. 1 Pentatone 5186992. 

Voici un enregistrement de la Deuxième Symphonie dite Résurrection de Gustav Mahler qui risque de diviser les mélomanes. Une future bataille d’Hernani pour malheriens avertis et ils sont nombreux ! En effet Semyon Bychkov étonne, interpelle, dérange même par ses choix interprétatifs. 

Les « contre » n’y verront qu’une sorte de message musical délivré en morse pendant une heure et vingt-six minutes. Un éloge d’un vague pointillisme symphonique tant le chef semble décortiquer chaque mesure de l’œuvre. Pourtant si l’on regarde le chronomètre de près le russe se situe au final dans un entre deux avec d’un côté les lièvres Mehta, Solti et même le légendaire Bruno Walter (autour des 1h20 pour les trois) et les tortues comme Bernstein dernière mouture et Gatti (respectivement 1h33 et 1h28). Au compteur Bychkov s’inscrit plutôt dans les pas de Claudio Abbado ou d’un Bernard Haitink donc tout va bien sur ce plan. 

Oui tout va bien Madame la Marquise vous dirons les « pour » ! On prend son temps et cette très relative lenteur sert la mise en valeur de l’œuvre. Un décodage salvateur pour en démontrer toutes les nuances et les richesses loin des habituelles critiques des détracteurs de l’œuvre de Mahler qui ne se résume selon eux qu’à un dédale sonore. 

Chacun se fera son opinion sur l’opportunité de cette ligne artistique. Une chose est certaine c’est que ce postulat vide totalement l’œuvre de sa densité et de sa dramaturgie. Tout passe comme si de rien n’était et soudain arrive le dernier mouvement et là on se prend à espérer un hypothétique feu d’artifice. Mais non pas de miracle. On ne ressent plus les mêmes émotions qu’à l’habitude dans le final qui est parmi les plus marquants du répertoire occidental et c’est cela le plus grave ! Tout est foutu ! Que vaut une Résurrection sans cette inéluctable montée vers l’apothéose, vers la transcendance ? L’ombre sans la lumière en résumé. 

Ce voile de regrets masque au passage les qualités indéniables de l’Orchestre et du Chœur de la philharmonique tchèque. La phalange est rompue à ce répertoire est cela s’entend. Sans parler des deux solistes Christiane Karg et Elisabeth Kulman qui sont superbes dans leurs parties respectives. Tout le monde fait plus que tenir son rang mais c’est la vision d’ensemble qui fait défaut. 

Après une Quatrième Symphonie de haut vol notre déception est à la hauteur de nos attentes. Nous espérons vite revoir Semyon Bychkov en meilleure forme dans ce répertoire qui lui réussit pourtant si bien de coutume. Au niveau de la discographie nous recommandons Abbado/Lucerne qui reste un sommet indépassable. 

Son : 10 – Répertoire : 10 – Interprétation : 6

 Bertrand Balmitgère

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