Liturgie mariale autour d’une figure majeure du Baroque de Bohême

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A Lily among thorns. Adam Václav Michna (c1600-1676) : sélection tirée de Ceská mariánská musika. Alessandro Grandi (1586-1630) : Ave Maris Stella. Heinrich Ignaz Franz Biber (1644-1704) : Sonate no 1 en ré mineur [Rosenkranzsonaten]. Giovanni Girolamo Kapsberger (c1580-1651) : Canzone prima [Libro quarto d’intavolatura di chitarone]. Vincenzo Albrici (1631-1687) : Sonata a due violini à basso continuo. Samuel Capricornus (1628-1665) : Sonate no 4 [Taffel-Lustmusik]. Hana Blažíková, soprano. Jana Semerádová, Collegium Marianum. Livret en anglais, allemand, français, tchèque ; paroles en latin et tchèque, traduction en anglais. Août 2020, mars 2022. TT 60’04. Supraphon SU 4317-2

Un précédent album du Collegium Marianum tissait un pont entre le vieux continent et le Nouveau monde et, fidèlement à son épithète, cultivait la thématique mariale, dont voici un autre aspect. Lilium Inter Spinas, « un lys parmi les épines », provient d’un Livre de la Bible (Chant de Salomon), mais la notice de ce CD n’explique pas vraiment la citation qu’il s’est choisie pour titre. L’on devine cependant une allusion à la Sainte Mère, dans la mesure où le disque lui accorde une large place au travers de la sélection puisée au recueil Ceská mariánská musika (Musique tchèque pour la Vierge Marie) : dix chants, sur les propres textes d’Adam Václav Michna, poète et un des grands compositeurs de Bohême au XVIIe siècle. Il reçut une instruction chez les Jésuites, et put librement mener son activité d’organiste par le confort que lui assurait son négoce de vin. Orienté vers la tonalité moderne, ce recueil paru en 1647 à Prague marque une rupture esthétique avec la production antérieure des hymnes dans cette sphère d’Europe centrale, ancrée dans le modalisme.

L’influence latine s’y fait également sentir et justifie un programme entrecroisé avec deux compositeurs transalpins : Ave Maris Stella d’Alessandro Grandi, qui officia dans les chapelles d’Italie du Nord (Venise, Ferrare, Bergame), et la Sonata a due violini à basso continuo de Vincenzo Albrici, formé au Collegium Germanicum de Rome. Car le parcours inclut aussi des pages instrumentales pour violon(s), ici sous les archets de Lenka Torgersen et Vojtěch Semerád, qui nous ramènent ensuite en terre de Bohême : une des « Sonates du Rosaire » de Biber, -la toute première du cycle, celle dédiée à l’Annonciation, alors que la thématique du CD aurait plutôt conduit à choisir une des deux dernières, illustrant l’Assomption et le Couronnement de la Vierge. Voici encore une Sonate de Samuel Capricornus, né à Žerčice, pour laquelle l’équipe a invité une triple harpe au sein du continuo. Dirigée de la flûte à bec par Jana Semerádová, l’ensemble inclut aussi viole de gambe (Hana Fleková), violone (Ján Prievoznik), orgue (Filip Hrubý) et théorbe (Jan Krejča), lequel se distingue en solo dans une Canzone de Kapsberger.

La musique sacrée de Michna (Messes, Requiem, Loutna česká…) a déjà été abordée par la discographie, notamment des extraits du Ceská mariánská musika par le Chorus Angelus (Angel, 2000). Par son anthologie, la proposition du Collegium Marianum s’avère cependant sans réelle concurrence. Autour de la voix souple et fleurie d’Hana Blažíková, d’une exquise gracilité (Stála Matka litujici), une réalisation soignée procure un suave plaisir : à l’instar de ce Jak jest Maria seznala subtilement distillé et relancé, à écouter en boucle.

Son : 9 – Livret : 8,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 9,5

Christophe Steyne

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