Naxos poursuit son intégrale des sonates de Scarlatti avec de rares pièces, délicatement servies 

par

Domenico Scarlatti (1685-1757) : complete sonatas, vol 26. Bruno Vlahek, piano. Octobre & décembre 2019. Livret en anglais. TT 64’48. Naxos 8.574221

Naxos poursuit son intégrale des « Sonates » de Scarlatti, initiée en juin 1994 par Eteri Andjaparidze et dont chaque volume est confié à un différent pianiste. Suivirent Michael Lewin, Jenő Jandó, Beatrice Long, Benjamin Frith, Evgeny Zarafiants, Konstantin Scherbakov, Soyeon Kate Lee, Francesco Nicolosi, Colleen Lee… Plus récemment Sergio Monteiro, Alon Goldstein (volumes 23 et 24, recensés en nos colonnes par Ayrton Desimpelaere le 13 juillet dernier) et Pascal Pascaleff. C’est au tour de Bruno Vlahek, qui élargit les horizons en puisant dans diverses collections : celle de Ralph Kirkpatrick bien sûr, mais aussi treize pièces rares (certaines d’attribution incertaine) piochées dans les archives de la Cathédrale de Valladolid, la Bibliothèque de Barcelone, l’Institut portugais de l’Héritage Culturel, le Conservatoire Royal de Madrid, la Bibliothèque de l’Université de Turin, et l’Abbaye de Montserrat. Le livret, signé de Keith Anderson, détaille et discute les sources de chacune d’elles, et les introduit en quelques mots.

Hormis la K. 380 en mi majeur, peu de stars de la production scarlatienne. La sélection écarte les numéros de bravoure (exception pour la fringante K. 435, ou la plage 15) mais privilégie des sonates expressives, le tableau d’atmosphère. La virtuosité cède la préséance à d’autres exigences : raffinement du phrasé (parfois jusqu’au dépouillement, cf la sol mineur de la plage 21), travail de la couleur, et en cela le pianiste croate réussit un parcours fort probant. La notice ne dit rien de l’instrument, et c’est dommage tant il apparaît délicat, joliment timbré, avec un registre medium riche, des basses charnues mais non collantes, un aigu châtié. Un toucher fluide, aéré, des tournures sensibles et intelligentes (exit la vaine préciosité), un relief ouvragé avec science : la K. 333 ! Pour prendre un repère célèbre, écoutez comment se murmure la K. 380 : vraiment classieux !

Scarlatti, plutôt côté boudoir. Bruno Vlahek entretient une relation complice avec son clavier, cisèle chaque étape avec tant de goût et de style que l’on regrette que cette intégrale, selon la loi d’alternance des artistes qu’elle s’est fixée, risque de se poursuivre sans lui. Certains moments sont suggérés avec un tel modelé qu’on pense aux témoignages de Christian Zacharias (Emi), un tel soin de mosaïste que l’on pense même parfois au légendaire album de Vladimir Horowitz, -excusez le compliment. Raison supplémentaire pour que ce jalon, qu’on croirait marginal, soit marqué d’une pierre blanche, de par ses seules vertus interprétatives.

Son : 9 – Livret : 9 – Répertoire : 9 – Interprétation : 9

Christophe Steyne

 

 

 

 

 

 

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