Samy Rachid-Sahrane du quatuor Arod 

par

Le Quatuor Arod est l’une des formations chambristes en pleine affirmation internationale. Alors que sort un album consacré à des oeuvres de Schubert dont l’illustre Quatuor n°14 “La jeune fille et la mort”, et avant un concert à Bozar début novembre, Crescendo Magazine s'entretient avec Samy Rachid-Sahrane, violoncelliste du Quatuor Arod. 

Votre nouvel album est consacré à des oeuvres de Schubert dont le célèbre quatuor La jeune fille et la mort ? Pourquoi ce choix ?

Nous avons jusqu’à maintenant construit nos projets discographiques autour d’une œuvre qui avait une importance particulière par rapport à l’histoire de notre groupe. Pour ce troisième opus, il n’y a pas eu d’hésitation ! Ça devait être La jeune fille et la mort qui est l’œuvre sur laquelle nous nous sommes construits. Les premières notes du Quatuor Arod furent le Quatuor opus 13 de Mendelssohn ainsi que ce Quatuor n°14 de Schubert. L’oeuvre de Mendelssohn figure sur notre premier album et celle de Schubert sur cette nouvelle parution. 

Dans votre répertoire au disque, je pointe votre premier album dédié à Mendelssohn et ce formidable disque nommé The Mathilde Album et centré sur des aspects de la modernité viennoise. Votre nouvel album nous conduit chez Schubert. Est-ce le reflet d’une attirance pour la musique de la sphère germanique ?

Tout à fait. Le répertoire germanique est véritablement le cœur de notre répertoire. Ce qui n’enlève rien à l’amour intense que nous avons pour notre répertoire national ainsi que celui d’Europe de l’Est, en particulier Bartók. Mais n’oublions pas que le répertoire pour quatuor à cordes est constitué en grande majorité d’œuvres germaniques ou de compositeurs qui sont passés par Vienne ! Depuis nos débuts, nous avons toujours ressenti pour ce répertoire un attrait particulier qui est sûrement dû à l’influence des grands quatuors du siècle dernier comme le Quatuor Alban Berg pour n’en citer qu’un.

Pour votre prochain concert à Bozar, vous programmez deux quatuors de Beethoven. Certes, les quatuors de Beethoven sont la base du répertoire, mais est-ce que vous envisagez une intégrale ?

Il se trouve que nous préparions un projet sur les trois quatuors dédiés à Razumovsky, et que Bozar était très emballé par celui-ci ! La crise sanitaire étant passée par là, nous avons dû réduire le temps du concert et ne nous concentrer que sur deux. Bien évidemment, nous pensons à l’intégrale des oeuvres de Beethoven, c’est l’aventure la plus exaltante à laquelle un quatuor peut rêver. Cette année Beethoven en est la preuve ! Mais nous parlons là d’un ensemble de seize quatuors, ce qui nécessite une grande préparation et le recul nécessaire pour être à la hauteur de l’événement. Nous nous accordons encore plusieurs années de préparation !

Vous avez été Rising Star de l’association ECHO des grandes salles de concert dont Bozar. Vous revenez désormais à Bozar dans le cadre de sa nouvelle saison. Est-ce qu’une telle nouvelle invitation a un sens particulier pour vous ?

ECHO Rising Star est une opportunité incroyable pour tout jeune soliste ou ensemble, nous avons soudainement la possibilité de nous produire dans les plus belles salles d’Europe ! C’est à la fois une joie immense et une grande responsabilité. Nous avons avec Bozar une relation particulière, c’est la quatrième fois que nous avons la chance de monter sur la scène de cette salle depuis notre fondation, il y a 7 ans. Le public belge, et particulièrement bruxellois, est très important pour nous. Nous avons eu la chance de travailler pendant 3 ans à La Chapelle Musicale auprès du Quatuor Artemis, c’est un peu comme revenir chez nous quand nous jouons à Bruxelles, et toujours un moment privilégié dans notre saison. 

Est-ce que le répertoire contemporain vous attire ?

Le répertoire moderne a toujours eu une place centrale dans notre répertoire. Ce qui se passe à Vienne au début du XXe siècle est absolument fascinant ! Tout comme le chemin emprunté par les compositeurs hongrois comme Kurtág et Ligeti. Pour ce qui est des compositeurs de notre temps, nous préférons privilégier des collaborations sur des projets bien spécifiques. Nous avions par exemple passé commande à Benjamin Attahir de son premier quatuor, et ce fut un travail absolument fascinant ! 

Dans une interview, Gabriel Le Magadure du Quatuor Ebène nous disait qu’ «entrer dans un quatuor, c’est entrer en religion ou adopter une nouvelle famille ». Partagez-vous ce point de vue ?

Nous n’allons pas le contredire ! La vie d’un quatuor est un équilibre fragile qu’il faut chérir. Créer une identité à quatre est un travail unique. Nous avons beaucoup travaillé avec le Quatuor Ebène et ils ont toujours été très investis dans le développement de leurs élèves et toujours de bon conseil sur la vie à quatre. 

Faire de la musique, c’est par nature partager, en particulier la musique de chambre. La sombre période que nous traversons avec ses confinements et couvre-feux marque un repli sur soi. Est-ce que cela a une influence sur votre approche musicale ou votre sensibilité musicale ?

Tout à fait. Pendant le grand confinement de mars à mai, nous avons été séparés. Les premières notes qui ont résonné lors de la première répétition qui a suivie ont été comme une libération ! Partager la musique à nouveau, c’était comme retrouver l’usage de notre voix. Depuis, l’accès réduit aux scènes rend chaque concert encore plus unique et nous rappelle à quel point la culture est vitale à notre société et ne doit pas être abandonnée ! Nous sommes extrêmement reconnaissants au public de continuer à faire vivre les théâtres et les salles de concert !

Le site du quatuor Arod : https://quatuorarod.com

  • A écouter :

Franz Schubert : quatuor à cordes n°14  en ré mineur D.810 "La jeune fille et la mort", Quartettsatz en Ut mineur D703, Quatuor à cordes n°4 en Ut. D46. Quatuor Arod (Jordan Victoria, Alexandre Vu, violons ; Tanguy Parisot, alto ; Samy Rachid-Sahrane, violoncelle. 1 CD Warner

 

  • Au Concert : 

Ludwig van Beethoven : Quatuor à cordes n° 8, op. 59/2, "Razumovsky" et Quatuor n° 9, op. 59/3, "Razumovsky". Bozar, 4 novembre 2020.

 

 

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.