Une nouvelle version du requiem allemand sur instruments d'époque !
Johannes Brahms (1833-1897) : Ein Deutsches Requiem, op. 45. Carolyn Sampson, soprano ; André Morsch, baryton ; Capella Amsterdam ; Orchester of the Eighteenth Century, Daniel Reuss, direction. DDD-2018 - 70'26" - Livret en anglais, néerlandais, français et allemand - Glossa - GCD 921126.
Porteur d'un message universel, ce Requiem allemand, créé le vendredi saint en 1868, ouvre un nouveau chapitre dans l'évolution de Brahms ; il parfait sa maîtrise du langage symphonique comme en témoigne aussi la poignante Rhapsodie pour alto, chœur d'hommes et orchestre qui suivra un an après.
Avec ses 70 à 80 minutes suivant les interprétations choisies, c'est la plus longue oeuvre de Brahms. Le souvenir de son ami Robert Schumann n'en est pas absent mais ce n'est qu'en 1865, après la mort de sa mère, qu'il en aborde la composition. Le qualificatif d'allemand se réfère à la langue volontairement choisie par le compositeur. Au lieu de la traditionnelle liturgie latine à laquelle il renonce, il préfère la bible protestante de Martin Luther. C'est ainsi qu'il fait appel aux Psaumes, à Isaïe, au livre de Sagesse, à l'Apocalypse de Saint-Jean et aux épitres aux Hébreux ou aux Corinthiens.
Le nombre d'interprétations de haut niveau ne manque pas. Klemperer avec Schwarzkopf et Fisher-Dieskau, Kempe avec Grummer et le même Fisher-Dieskau, les incontournables Karajan depuis celui de 1947 avec Elisabeth Schwarzkopf, Hans Hotter et le Wiener Philharmoniker ou avec le Berliner Philharmoniker, Gundula Janowitz et Eberhard Wachter en 1964, Anna Tomowa-Sintow et José van Dam en 1976 sans oublier, toujours avec José van Dam, Barbara Hendricks en 1983 ou Kathleen Battle un peu plus tard. Rattle, Abbado, Giulini ou le regretté Hickcox nous ont aussi laissé des interprétations inoubliables. Sur instruments d'époque, Gardiner, Harnoncourt et Herreweghe s'y sont aussi risqués sans satisfaire complètement.
C'est également le cas de cette très belle interprétation du chef hollandais Daniel Reuss qui est malheureusement quelque peu déforcée par une prise de son trop voilée. La notice très détaillée de Clemens Romijn précise les raisons des tempi inhabituels choisis ; Reuss, en effet, comme ses trois prédécesseurs sur instruments d'époque, accélère quelque peu les mouvements lents et ralentit les plus allants. Il privilégie la chaleur, le lyrisme et la délicatesse. Le choeur et l'orchestre suivent parfaitement les intentions du chef et ses deux solistes forcent l'admiration ; il suffit d'écouter Carolyn Sampson dans le cinquième mouvement (Ihr habt nun traurigkeit, tu es maintenant rempli de tristesse) ou de se laisser envahir par la conviction d'André Morsch.
Ne gâtons pas notre plaisir, c'est une très belle version de plus dans une discographie déjà bien riche et un bel hommage de l'orchestre néerlandais rendu à son fondateur, Franz Brüggen !
Jean-Marie André
Son : 8-Livret : 10-Répertoire : 10-Interprétation : 9