Au Concert

Les concerts un peu partout en Europe. De grands solistes et d’autres moins connus, des découvertes.

Les Siècles, avec Sol Gabetta qui magnifie Saint-Saëns, et Ustina Dubitsky qui honore Ravel

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Le dernier concert de l’orchestre Les Siècles, au Théâtre des Champs-Élysées, était entièrement consacré à la musique française, avec Camille Saint-Saëns en première partie, et Maurice Ravel en seconde.

Pour commencer, la très célèbre Danse macabre (si célèbre que le compositeur s’en servira pour s’autoparodier, dans les Fossiles du Carnaval des animaux, indiquant alors Allegro ridicolo). Les douze coups de minuit de la harpe sont particulièrement présents et inquiétants, dans un tempo plutôt rapide, tandis que le reste de l’orchestre aurait plutôt tendance à s’abandonner. Le violon solo, volontairement désaccordé, entre : François-Marie Drieux joue le jeu à fond, prend tous les risques, trouvant, avec une grande sûreté technique, des sonorités tour à tour grinçantes et chaudes. Rien d’agressif, ni de caricatural, dans la direction toujours très musicale d’Ustina Dubitsky. C’est presque un peu sage, avec des cuivres plutôt discrets.

De tous les concertos pour violoncelle du répertoire, le Premier de Saint-Saëns est l’un des plus joués (il en a bien écrit un Deuxième, mais il est moins valorisant pour le soliste, et, il faut bien le dire, moins inspiré). Son succès doit beaucoup à son écriture orchestrale, particulièrement vivante. La partie soliste consiste pour beaucoup en gammes et en arpèges, et demande un ou une musicienne très imaginative pour maintenir l’intérêt du public. C’est assurément le cas de Sol Gabetta !

Dans la communication de ce concert, elle est présentée comme dirigeant l’orchestre depuis son violoncelle. En réalité, c’est le violon solo, réhaussé par une petite estrade, qui fait office de chef d'orchestre. Pour avoir vu, quelques jours plus tôt, Sol Gabetta jouer en soliste avec un chef d'orchestre (le Concerto d’Elgar, dirigé par Mikko Franck), nous pouvons constater que son attitude vis-à-vis de l’orchestre est la même.

A Genève, l’OSR collabore avec le Festival Les Créatives 

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A Genève, du 12 au 25 novembre, a lieu la 20e édition du Festival Les Créatives, événement pluridisciplinaire qui met en lumière la production artistique et intellectuelle des femmes et minorités de genre. A son programme de saison, l’Orchestre de la Suisse Romande ajoute, le 13 novembre, un concert qui rend hommage à cinq compositrices des XIXe et XXIe siècles. 

Que les temps ont changé si l’on pense qu’il a fallu attendre 1870 pour que s’ouvre au Conservatoire de Paris une classe de composition féminine, ce que devait ignorer, en 1892, un Antonín Dvořák  estimant que les femmes n’avaient pas de force créatrice…

A la tête de l’Orchestre de la Suisse Romande, la jeune cheffe polonaise Zofia Kiniorska se fait fort de prouver le contraire. Ayant obtenu en 2021 sa maîtrise ès-arts en direction d’orchestre et d’opéra à l’Université de Musique Frédéric Chopin de Varsovie, elle a été nommée cheffe assistante de l’OSR pour la saison en cours. Et c’est à une compositrice valaisanne présente dans la salle, Sandrine Rudaz, qu’échoit l’honneur d’ouvrir les feux. Établie à Los Angeles, elle enregistre sa musique dans un studio renommé comme l’Eastwood Scoring Stage à la Warner Bros. Les deux pièces présentées ici se rattachent à la musique de film à l’orchestration luxuriante. The Golden Phoenix confie au cor solo le soin d’évoquer l’approche du Phénix, oiseau fabuleux de la mythologie égyptienne, profitant du soutien des cordes pour atteindre son apogée et livrer un combat où il trouve la mort. De ses cendres, la flûte le fait renaître en imposant progressivement à l’ensemble des pupitres une générosité mélodique qui dépeint l’ascension vers les sommets, même si le piano en commente la fragilité. Aurore boréale cultive la même veine en décrivant à la fois la clarté et la beauté émergeant de l’obscurité comme la force de l’être humain confronté aux difficultés de l’existence. De la sérénité initiale se dégage une transition vers l’héroïsme où la détermination permet de surmonter les obstacles avant le retour au thème du début enrichi par une compréhension accrue par les épreuves.

A la suite des applaudissements nourris adressés à la compositrice, Zofia Kiniorska présente trois figures emblématiques du XIXe siècle, dont la plus captivante est assurément Mel Bonis (1858-1937), élève de César Franck, mariée contre son gré à un industriel de vingt-cinq ans plus âgé qu’elle, mais ayant une liaison cachée avec un chanteur d’opéra. De ses 300 œuvres pour diverses formations émerge un cycle de pages orchestrales évoquant des femmes de légende. Ainsi Le Songe de Cléopâtre op.180 impose un coloris orchestral qui se corse d’élans pathétiques par l’usage des cuivres, avant de sombrer dans une élégie mélancolique reflétant les états d’âme contrastés qui trouveront une conclusion abrupte. Ophélie op.165 est dépeinte par des bois plaintifs sur arpèges de harpe, confiant aux cordes ses impulsions passionnées que le destin condamnera par la marche implacable des vents, tandis que Salomé op.100/2 évoluera sur les éclats sauvages d’une danse que les bois rendront lascive pour s’achever étrangement devant la béance du néant.

Triomphal Requiem de Verdi à Bruxelles

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Ambiance des grands soirs au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles avec ce Requiem de Verdi joué à guichets fermés pour 2 concerts. Il faut dire que le programme de cette soirée enfilait les satisfactions : un tube adoré du public, des forces musicales de La Monnaie sous la direction d’Alain Altinoglu dont on sait que c’est l’un des tandems artistiques majeurs de notre temps et une distribution de très haut vol avec en prime Marie-Nicole Lemieux, adorée à Bruxelles depuis son triomphe au Concours Reine Elisabeth  2000.

Les suites pour violoncelle par Sonia Wieder-Atherton à Saint Pierre aux Nonnains de Metz

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Pour accompagner la sortie de ses disques des Six suites pour violoncelle de Bach, Sonia Wieder-Atherton donna deux concerts à la basilique Saint Pierre aux Nonnains de Metz les 6 et 7 novembre 2024. La violoncelliste aura attendu d’être dans sa soixantième année pour oser l’interprétation de cette somme de profondeurs et de légèreté. Le choix d’un ancien lieu de culte, donc d’un lieu propice à l’écoute, au silence et à l’intériorité fut un choix judicieux pour cette musique de l’intime. 

Cette bible des violoncellistes, comme ce recueil est si justement surnommé, reste pour les amateurs d’une insondable beauté. Utilisant une virtuosité technique pour l’expression de la grande mélodicité de chacun de ses mouvements, comme la simplicité apparente du prélude de la première, ou le raffinement de la sarabande de la cinquième suite, elle semble exprimer le for intérieur de son auditeur. 

Le programme de Sonia Wieder-Atherton se déroula donc sur deux soirées. Le 6 novembre, elle joua les suites numéro 4, 5 et 1 et le 7 novembre, les 3, 2 et 6.

La suite numéro 4 commence par un prélude aux notes graves et boisées, proches de celles du théorbe, pour venir à des sonorités plus légères dans les mouvements dansants. La suite numéro 5, suit d’ailleurs ce mouvement ascensionnel. Son exécution, révélant dans ses difficultés l’agile doigté de Sonia Wieder, est un parfait exemple de la monté vers la joie de ces suites, Et si le jeu de Sonia Wieder-Atherton débuta par sonner un peu sec, il se fluidifia avec le temps pour être d’une évidence sobre. Le parallélisme entre la sécheresse arrivant à une grande liberté dans l’exécution et la profonde intériorité aboutissant à une grande joie dans la composition vient rapidement à l’écoute de Sonia Wieder-Atherton. 

La rigueur de l’artiste dans l'exécution des préludes frôlait parfois à l’excès de technicité et encornait leurs charmes, comme dans la cinquième suite. Elle ne manquait cependant jamais de les faire respirer, de leur insuffler de la joie, et même, comme dans la célèbre première suite, dont elle bissa le premier menuet, d’arriver à une sorte d’extase intérieur. La délicatesse avec laquelle elle fit mourir la note dans la sarabande de la troisième et la profondeur du son dans la deuxième suite n’échappèrent pas non plus au public. 

L’Orchestre de Chambre de Genève célèbre Fauré et… Ives 

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En parallèle à l’Orchestre de la Suisse Romande, l’Orchestre de Chambre de Genève propose une saison de dix concerts qui sort des sentiers battus : preuve en est le titre de l’actuelle : « Jetez-vous à l’eau ! ». 

Le deuxième de la série qui a pour cadre le Bâtiment des Forces Motrices à Genève a lieu le 4 novembre 2024, cent ans jour pour jour après la mort de Gabriel Fauré. Raphaël Merlin, le chef titulaire de la formation, inscrit donc au programme le Requiem op.48 et le Madrigal op.35 en intercalant entre ces deux œuvres une page peu connue du professeur de Fauré, Camille Saint-Saëns, intitulée Le calme des nuits datant de 1882. Mais comme le concert a pour titre In the dark, l’audace consiste à les mettre en perspective avec deux pièces orchestrales de Charles Ives, Central Park in the Dark et The Unanswered Question datant toutes deux de 1906.

En préambule, Raphaël Merlin prend la parole en expliquant que la salle sera pratiquement plongée dans le noir, alors que les quatre premières pièces seront enchaînées afin de passer progressivement vers la lumière, fût-elle intérieure, avec le Requiem de Fauré.

Et c’est par le Madrigal op.35 du même Fauré que commence le programme. Ecrit en 1883 comme un malicieux cadeau de mariage pour son ex-élève André Messager, cette épigramme, brocardant l’égoïsme cruel dans les affaires de cœur, est élaborée sur un poème d’Armand Sylvestre et est présentée ici dans une version pour chœur et orchestre datant du printemps de 1892. Y prend part l’Ensemble Vocal de Lausanne, remarquable au niveau de l’équilibre des registres, dialoguant avec l’Orchestre de Chambre de Genève qui sait ce que veut dire « accompagner »… Dans la semi-obscurité, Raphaël Merlin impose un phrasé onctueux et une sonorité chaleureuse, réduisant à la portion congrue le côté piquant du texte. L’on en dira de même de la page de Saint-Saëns, Le calme des nuits op.68 n.1, présentée ici a cappella, cultivant une nostalgie intériorisée où les paroles n’ont que peu d’importance.

Ces deux oeuvres chorales sont entrecoupées par les deux pièces orchestrales de Charles Ives. L’Orchestre de Chambre de Genève s’en fait l’éloquent défenseur. Central Park in the Dark tient de la contemplation sur fond de cordes bruissant atonalement, tandis qu’un piano suggère des bribes de ragtime qui vont en s’amplifiant pour éveiller le quartier, avant de revenir à l’imperceptible dans l’obscurité. The Unanswered Question brosse un canevas identique par le pianissimo des cordes soutenant les bois qui tentent de répondre à la trompette en sourdine juchée à l’une des extrémités du parterre. Que lui dire, alors qu’est formulée la question métaphysique sur l’existence ? Ne vaut-il pas mieux revenir au silence ?

Concert hommage à Gabriel Fauré : un dialogue raffiné entre Keigo Mukawa et Cristian de Sá

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À l’occasion du centenaire de la disparition de Gabriel Fauré, le pianiste Keigo Mukawa et le violoniste Cristian de Sá s’unissent pour un concert-hommage à Paris, dans le cadre intime et raffiné de la Salle Cortot. Ce programme, centré autour des deux Sonates pour violon et piano de Fauré, explore un demi-siècle de créativité musicale à travers deux œuvres contrastées par leur style et leur approche harmonique.

Si Keigo Mukawa est connu des mélomanes français et belges grâce à ses deuxième et troisième prix respectivement aux concours international Long-Thibaud (2019) et Reine Elisabeth (2021), Cristian de Sá, d’origine italo-portugaise et de nationalité anglo-portugaise, n’est pas encore familier de nos publics. Pourtant, il est nommé « Jeune star classique » par Classic FM, il mène une carrière internationale à Amsterdam, Londres, Salzbourg, Bucarest, Lisbonne, Madrid et tant d’autres villes. 

Les deux sonates pour violon et piano de Fauré, composées à près de quarante ans d’intervalle, témoignent de l’évolution stylistique du compositeur et des bouleversements artistiques de son époque. La Première Sonate op. 13, écrite en 1876, est empreinte d’un lyrisme post-romantique et d’une grande richesse mélodique. En revanche, la Seconde Sonate, op. 108, composée en 1917, s’inscrit dans une esthétique personnelle, marquée par un langage plus introspectif. À travers ces deux œuvres, Mukawa et de Sá dévoilent non seulement la continuité dans l’écriture fauréenne mais aussi les nuances, plus raffinées et délicates, qui émergent avec le temps.

Pour compléter ce programme, les deux musiciens interprètent également la Sonate posthume de Maurice Ravel, une œuvre rare du répertoire. Bien que distincte des sonates de Fauré, cette pièce révèle un hommage discret au maître par Ravel, son ancien élève. Dès les premières notes, Mukawa et de Sá instaurent une atmosphère d’une grande sensibilité, mettant en valeur les subtilités harmoniques et les variations d’intensité de l’œuvre. Les deux interprètes, par leur approche à la fois précise et poétique, font vibrer la richesse de cette sonate méconnue avec une sensibilité proprement ravélienne.

Tap virtuoso à La Fab. 

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Entourée de tableaux de la collection d’Agnès b. dont certains sont décrochés des murs au fur et à mesure que le public prend place dans ce nouvel espace, une scène surélevée fait face aux spectateurs. Bientôt les œuvres de Bach, de Scarlatti, de Beethoven ou encore de Chopin se mélangeront aux rythmes des « chaussures magiques » d’Aurélien Lehmann, créant des lignes polyphoniques insoupçonnées.

D’octobre à juin, la galerie d’art contemporain La Fab. présente, en complicité avec Sylvie Valleix, sa propre saison musicale ponctuée par quatre performances, toutes dédiées au piano.

Pour cette première expérience, La Fab. a accueilli un duo pas comme les autres. Accompagné de Vessela Pelovska, pianiste des répétitions et chef de chant du ballet pour le ballet de l’Opéra national de Paris depuis 1999, le tap dancer virtuose Aurélien Lehmann a proposé une révision de nos classiques. Il a ainsi chorégraphié la marche turque de Mozart ou encore imaginé une promenade de Schubert dans les rues de Vienne au son des claquettes imitant les bruits d’une calèche. Bien sûr, nous avons eu droit à « I Got Rhythm » de George Gershwin, et le plus étonnant est que cette tradition venant de Broadway n’a pas du tout habillé Bach en paillettes. Bien au contraire, elle a su s’intégrer dans sa polyphonie, jouant aussi bien sur les nuances que sur les différents motifs contrastants. 

Passage remarqué de l’Oslo Philharmonic et Klaus Mäkelä à Bozar

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Ce dimanche 27 octobre a lieu le concert de l’Oslo Philharmonic à Bozar. L’orchestre norvégien est placé sous la baguette de son directeur musical, Klaus Mäkelä. En soliste au violon, nous retrouvons la violoniste norvégienne Vilde Frang. Trois œuvres sont au programme de cette soirée : la Rhapsodie Roumaine N°1 en la majeur Op. 11 de Georges Enescu, le Concerto pour violon et orchestre en ré majeur d’Igor Stravinsky et, pour finir, la Quatrième Symphonie en fa mineur, op. 36 de Piotr Ilitch Tchaïkovsky.

Ce concert débute avec la Rhapsodie Roumaine N°1 en la majeur Op. 11 de Georges Enescu. Pour composer cette pièce, le compositeur roumain puise dans la musique populaire roumaine. Cette rhapsodie, datant de 1901, est une des pièces les plus célèbres d’Enescu. Les solistes de la petite harmonie s’illustrent dès le début de la pièce en s’échangeant la mélodie dans une continuité certaine. Par la suite, la rhapsodie prend de plus en plus vie, les passages charmants devenant vifs. Mäkelä, survolté, se donne sans calculer pour vivifier au maximum cette partition. Cette prestation endiablée et engagée est largement acclamée par un public presque en délire après cette première pièce.

Le Concerto pour violon et orchestre en ré majeur d’Igor Stravinsky est créé en 1931 par le violoniste américain Samuel Dushkin. Ce dernier est d’ailleurs le commanditaire de l’œuvre. Ce concerto se compose de quatre mouvements, ce qui reste tout de même assez rare. Ce soir, c’est la violoniste Vilde Frang qui se lance dans l’interprétation de cette pièce assez peu jouée en concert. Son rôle de soliste change au fur et à mesure des mouvements. Dans le premier mouvement, Toccata, Frang assure le fil conducteur en étant principalement accompagnée par les cordes graves et l’harmonie, jouant un rôle essentiel dans ce mouvement. Dans le deuxième mouvement, Aria I, c’est l’expressivité de la violoniste conjuguée aux dialogues avec l’orchestre que nous retiendrons. Dans le troisième mouvement, Aria II, Frang nous propose une version intimiste basée sur l’émotion qu’elle transmet. Le dernier mouvement, Capriccio, est une démonstration de virtuosité que Frang réussit avec brio. Ce concerto se clôture de manière vive et enjouée. Mäkelä dirige l’orchestre de manière précise dans cette partition qui peut s’avérer dangereuse à certains endroits. L’orchestre contribue également à la réussite de cette interprétation, tant il doit dialoguer avec la soliste et faire preuve d’une grande stabilité rythmique. La prestation est une nouvelle fois largement acclamée par le public dès la fin du concerto. Vilde Frang propose donc en bis une gigue d’Antonio Maria Bononcini.

Sol Gabetta et Mikko Franck dans leurs jardins à Radio France 

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Heureux les mélomanes parisiens amateurs de la musique concertante d’Elgar, qui ont eu l’occasion, en deux soirées consécutives, d’en écouter les deux Concertos, joués par deux des musiciennes les plus accomplies de la scène internationale actuelle. Après la violoniste norvégienne Vilde Frang à La Seine Musicale, c’était au tour de la violoncelliste argentine Sol Gabetta à la Maison de la Radio et de la Musique.

Certes, il y a une mauvaise nouvelle à la clé : la défection d’Hilary Hahn, qui a été contrainte, pour raison de santé (un double nerf pincé qui la fait souffrir depuis quelques mois, et qui est en bonne voie de guérison à condition qu’elle continue de s’économiser), d’annuler sa participation. Elle devait jouer le Concerto pour violon de Tchaïkovski, et à en juger par sa prestation dans cette œuvre à la Philharmonie, en 2017, cela aurait été certainement un grand moment de violon. Nous lui souhaitons le meilleur, et surtout le plus durable rétablissement possible.

C’est donc Sol Gabetta qui a accepté de la remplacer, pour ce concert mais aussi pour toute la tournée qui suivait dès le lendemain, avec cinq concerts consécutifs en Allemagne, au Luxembourg, en Belgique et en Hongrie avec, forcément, également un changement de programme. À noter qu’elle alternera les Concertos d’Elgar et de Lalo.

Sol Gabetta est une fidèle de Radio France. Elle avait notamment été artiste en résidence dans cette maison il y a trois saisons, et il y a quelques semaines elle jouait précisément ce Concerto de Lalo, dans le cadre d’une tournée en Espagne, également avec l’Orchestre Philharmonique sous la direction de Mikko Franck. C’est dire s’ils se connaissent bien. Et cela s’est affirmé avec éclat lors de ce concert.

Tournée du DSO Berlin avec Vilde Frang et Robin Ticciati : un Concerto d’Elgar qui fera date

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Pour sa dernière tournée avec son directeur musical depuis 2017, Robin Ticciati, le Deutsches Symphonie-Orchester Berlin (ou DSO Berlin) faisait escale aux portes de Paris, à la Seine Musicale qui a vu le jour, également en 2017, sur l’Île Seguin de Boulogne-Billancourt. Quelques mots de cet orchestre ne sont sans doute pas superflus, car l’histoire des formations symphoniques berlinoises est complexe, du fait de leur nombre (actuellement, il y en a rien moins que six orchestres professionnels permanents à Berlin !), et de l’histoire tourmentée de cette ville, entre partition entre les quatre puissances alliées, division entre Est et Ouest, et réunification. Le DSO a été fondé comme RIAS-Symphonie-Orchester – RIAS pour Rundfunk im amerikanischen Sektor – en 1946, puis s’est appelé Radio-Symphonie-Orchester Berlin – ou RSO Berlin – en 1956, quand les trois secteurs de Berlin-Ouest ont été réunis, et a enfin pris son nom actuel en 1993, après la réunification de l’Allemagne, laissant le nom de RSO à son homologue de l’ex-Allemagne de l’Est).

Ce concert avait lieu dans le cadre d’une tournée promotionnelle du CD enregistré par les mêmes interprètes, avec ce relativement rare Concerto pour violon d’Edward Elgar, CD unanimement loué par la critique (et notamment par Crescendo-Magazine, qui lui a décerné un Joker absolu), comme du reste la dizaine d’albums que Vilde Frang nous a laissés jusque-là. C’est que, indiscutablement, cette violoniste norvégienne fait partie des musiciennes de tout premier plan, et son nom est amené à rester dans l’histoire de l’interprétation.

Ce qu’elle nous a offert à la Seine Musicale, dans cet ample (par la durée – une cinquantaine de minutes – mais aussi par la profusion de ces thèmes) Concerto qui semble avoir, depuis quelques années, enfin trouvé son public, a tenu toutes les promesses de ce si remarquable enregistrement.