Mozart toujours aussi actuel. Merci Anton Webern, Thomas Adès, Péter Eötvös... l’ONDIF et Julien Leroy !
C’est un passionnant programme que nous proposaient l’Orchestre National d’Île-de-France et son chef invité Julien Leroy. Sous-titré « Dialogues avec Mozart », il donnait à entendre trois exemples d’œuvres du passé auxquelles des compositeurs récents ont donné un éclairage nouveau : en première partie Webern (avec Bach) et Adès (avec Couperin) ; en deuxième partie Eötvös (avec Mozart), chacune de ces deux parties se terminant par une œuvre originale de Mozart (la Musique funèbre maçonnique et la Symphonie dite « Haffner »).
Le chef d’orchestre, sur scène, explique la genèse de ce concert. Au départ, il y a la pièce Dialog mit Mozart (qui a donné, traduit en français et mis au pluriel, le titre général du programme) de Péter Eötvös. Cette pièce est partie d’une commande du Mozarteum de Salzbourg, qui a, en 2014, présenté au compositeur hongrois soixante-trois fragments musicaux laissés inachevés par Mozart. Remarquons ici que, si certaines raisons de cet abandon peuvent aisément se comprendre, et sont communes à tous les créateurs qui ne vont pas au bout de leurs idées, il en est une autre, spécifique à Mozart : il avait une mémoire musicale tellement prodigieuse qu’il lui arrivé de jouer, en concert, des œuvres qu’il n’avait pas eu le temps de finir de coucher sur le papier, mais qu’il avait en tête. Et, par la suite, il n’a jamais pris la peine de léguer ce qui manquait à la postérité. Cette remarque a son importance, car elle prouve que ce n’est pas toujours parce qu’il les jugeait indignes que Mozart a laissé certaines compositions en plan.
Eötvös a sélectionné onze de ces fragments, et en a tiré la pièce Da Capo, pour cymbalum (ou marimba) et ensemble instrumental. Deux ans plus tard, il l’a réécrite pour grand orchestre, et lui a donné le nom Dialog mit Mozart. L’ONDIF et Julien Leroy ont donc choisi de placer la notion de fragment au cœur de ce programme. Mais aussi sous un deuxième éclairage qui est parti de l’idée que ces courts motifs de Mozart, qui apparaissent puis disparaissent (Eötvös n’a pas toujours conservé le matériel laissé par Mozart dans son intégralité, utilisant en quelque sorte des fragments de fragments), donnent une impression d’ombres et de lumières. On retrouvera cette alternance dans les autres œuvres de ce programme.