Mariss Jansons, les années Oslo 

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Mariss Jansons : The Oslo Years. Oeuvres de Piotr Ilyich Tchaïkovski (1840-1893), Dmitri Chostakovitch (1906-1975), Johan Svendsen (1840-1911), Sergei Prokofiev (1891-1953), Modest Mussorgsky (1839-1881), Antonín Dvořák (1841-1904), Bedřich Smetana (1824-1884), Ottorino Respighi (1879-1936), Maurice Ravel (1875-1937), Paul Dukas (1865-1935), Béla Bartók (1881-1945), Jean Sibelius (1865-1957), Richard Wagner (1813-1883), Igor Stravinsky (1882-1971), Arthur Honegger (1892-1955); Camille Saint-Saëns (1835-1921), Richard Strauss (1864-1949), César Franck (1822-1890), Gustav Mahler (1860-1911), Ludwig van Beethoven (1770-1827), World encores avec des oeuvres de Bernstein, Kim, Alfven, Tchaikovsky, Dvořák, Sibelius, Elgar, Grieg, Bizet, Bach, Kodály, Mascagni, Villa-Lobos, Toyama, Dinicu, Chapi Lorente, Strauss, Gade, Theodorakis. Frank Peter Zimmermann, violon ; Truls Mørk, violoncelle ; Wayne Marshall, orgue. Oslo Philharmonic Orchestra, Mariss Jansons. Notice de présentation en anglais, allemand et français. 1 coffret de 21 CD et 5 DVD Warner Classics. Référence 0190295242473

Warner remet en boîte les enregistrements de Mariss Jansons au pupitre de l’Orchestre Philharmonique d’Oslo. Ces galettes sont importantes pour l’histoire de l’interprétation et dans le développement artistique et musical du chef d’orchestre. 

En 1979, Mariss Jansons devient directeur musical de la phalange scandinave. Cette désignation était attendue depuis les premiers contacts fructueux entre l’orchestre et le chef dès 1974. Mais le contexte de guerre froide et les tensions entre la Norvège frontalière de l’URSS et membre de l’Otan et la dictature rouge firent traîner les pourparlers. A l’orée des années 1980, le Philharmonique d’Oslo est un orchestre à la notoriété fortement locale et c’est justement le long règne de 23 ans de Mariss Jansons qui va en faire l’une des phalanges européennes les plus brillantes. 

Le charisme du chef et sa vision très claire du rôle d’un directeur musical permirent de construire peu à peu une réputation mondiale basée sur des tournées dans les grandes salles de concert et avec ce partenariat discographique au long cours avec feu EMI (désormais Warner). Conscients de la valeur artistique de ce tandem, les dirigeants d’EMI signèrent un contrat d’exclusivité avec les Norvégiens et leur chef. Acclamés pour la plupart, ces disques avaient progressivement disparu des rayonnages physiques et digitaux. On les retrouve donc avec grand plaisir ! 

Le répertoire est largement centré sur des partitions de démonstration, qu’il soit du XIXe siècle (Wagner, Tchaïkovski, Dvořák, Saint-Saëns, Smetana) ou du XXe siècle (Stravinski, Ravel, Respighi, Dukas, Chostakovitch, Sibelius, Honegger,...). On notera qu’il s’agissait du coeur de répertoire du chef ! Les commentateurs noteront qu’il s’agit presque exclusivement d’oeuvres purement symphoniques, à l’exception d’un Concerto n°3 de Saint-Saëns avec le violoniste Frank Peter Zimmermann ou d’une affiche de parade Dvořák/Tchaïkovski avec le violoncelliste Truls Mørk. Au fil de ce coffret, on peut apprécier le charisme de la direction qui galvanise tous les pupitres. On reconnait la patte sonore du chef qui traite la masse instrumentale avec un mélange de puissance et de flexibilité tout en travaillant les équilibres et le style. Rien n’est jamais lourd ou faussement démonstratif mais les oeuvres sonnent avec un sens narratif et une richesse idéale des couleurs. Le meilleur exemple de cette quadrature du cercle interprétatif réside dans le set de symphonies de Dvořák (n°5, n°7, n°8 et n°9), idéales dans leur rendu fruité des timbres et de la vitalité de l’instrumentation. Sibelius (symphonies n°1-n°3 et n°5) est ici gravé avec une force granitique et magmatique intense. Changement de registre avec des poèmes symphoniques romains de Respighi, parfaits de puissance et de sens du rythme. On atteint des sommets de la discographie avec l’une des plus formidables interprétations des Tableaux d’une exposition de Moussorgski en technicolor ou des Symphonies n°2 et n°3 d'Honegger magnifiée par une direction dramatique mais puissante, sans oublier le sens des contrastes des Symphonies n°5, n°6 et n°9 de Chostakovitch. D’autres oeuvres de démonstration sont portées par cette direction au panache conquérant et altier : les ouvertures de Wagner, Francesca da Rimini ou Roméo et Juliette de Tchaïkovski, la Symphonie n°3 de Camille Saint-Saëns, le Concerto pour orchestre de Bartók ou la Suite n°2 de Daphnis et Chloé de Ravel, et bien évidement Roméo et Juliette de Prokofiev. Mais l’une des pépites réside dans l’album intégralement consacré à des bis célèbres ou moins célèbres qui nous font faire un tour du monde symphonique, des fjords scandinaves et des froideurs nordiques avec Grieg ou Sibelius aux rives colorées de l’Amérique du sud de Villa-Lobos ou aux rythmes japonais endiablés de Toyama. Les 20 piécettes programmées sur ce disque sont de véritables leçons de direction d’orchestre dans un son spectaculaire.

L’Orchestre Philharmonique d’Oslo n’a certes pas le fini instrumental absolu et la personnalité sonore du Concertgebouw d’Amsterdam ou de l’Orchestre Symphonique de la Radio Bavaroise, mais sa vaillance et son brio témoignent du bâtisseur d’orchestre qu’était Mariss Jansons. 

Ce coffret propose en bonus 5 DVD de captations de concerts tirées des fonds de la télévision norvégienne NRK. Le chef dirige ses musiciens dans des oeuvres phares de son répertoire : Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, la Symphonie n°1 de Gustav Mahler ou encore Manfred de Tchaïkovski ou la Symphonie en ré mineur de César Franck dont il s’agit ici de la seule interprétation documentée avec Mariss Jansons. L’expérience du concert nous permet encore plus de cerner le charisme de cette direction qui galvanise les pupitres dans une gestion musicale communicative. 

Bientôt un an après le décès du maestro, ce coffret vient nous rappeler à quel point son art nous manque. Vendu à prix amical, ce beau coffret bénéficie d’un court mais excellent livret de présentation qui replace dans son contexte le tandem Jansons/Oslo. L’un des musts de l’année ! 

Pierre-Jean Tribot  

 

   

 

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