L’OPMC à l’espagnole avec Josep Pons et Nelson Goerner
L'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo dirigé par le chef catalan Josep Pons et le pianiste argentin Nelson Goerner nous invitent à faire un voyage musical dans le Sud de l'Espagne. L'Espagne et son soleil radieux, ses couleurs flamboyantes, ses parfums capiteux, ses rythmes trépidants, et ses langueurs d'été. Qui dit Espagne dit Ravel dont l’inspiration espagnole est centrale. Le concert commence avec l'Alborada del Gracioso de Maurice Ravel. L'orchestre réunit, en complément de son effectif habituel, deux harpes et un ensemble de percussions extrêmement varié dont les castagnettes et le xylophone. L'orchestre et Josep Pons sont d'emblée en symbiose et les instruments en parfaite synchronisation. Ravel est encore représenté par la Rapsodie Espagnole également magnifiée par la direction engagée de Josep Pons.
Contemporain de Maurice Ravel, qu'il rencontre lors de son long séjour en France, Manuel de Falla est représenté par les Nuits dans les jardins d'Espagne évocant une ambiance aux parfums orientaux pleine de mystère. Grâce à son tempérament de feu doublé d'une grande sensibilité, le brillant pianiste Nelson Goerner capture immédiatement l'esprit et les émotions typiquement espagnoles. La synergie entre le pianiste et l'orchestre est parfaite et le choix des tempi est en accord. Josep Pons dirige cette oeuvre avec sensibilité et passion. L'orchestre est d'une perfection immaculée. Le public lui réserve une ovation bien méritée. Il nous donne en bis le Nocturne n°20 en do dièse mineur de Chopin (celui interprété dans le film "Le Pianiste").
Autre chef d’oeuvre de Manuel de Falla, El Amor Brujo est une " gitanerie musicale"pour orchestre et cantaora (chanteuse de flamenco). Maria Toledo est une chanteuse incontournable du flamenco contemporain avec un parcours atypique : elle est diplômée en droit et quitte le cabinet d'avocats où elle travaillait pour se consacrer entièrement à sa passion, le flamenco. Elle a épousé il y a deux ans un torero. C'est une chanteuse surprenante avec une voix gutturale, puissante et chaude typique des gitanes, qui exprime la passion, la souffrance, l'amour et la mort. Ce timbre de voix est parfaitement adapté à l'esprit même de la partition. Josep Pons connaît son De Falla dans les moindres détails pour en avoir gravé des interprétations magistrales au disque (Harmonia Mundi). Il mène l'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo à des sommets avec des sonorités opulentes. L'orchestre est tantôt brillant, incandescent, éblouissant, et soudain sombre et ténébreux.
Monte-Carlo, Auditorium Rainier III, 6 juin 2021
Carlo Schreiber
Crédits photographiques : Jean-Louis Neveu