Mahler, l’effet Dudamel  ?

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Gustav Mahler (1860-1911) :  Symphonie n°8 en mi bémol majeur, dite « des Mille ».  Tamara Wilson, Leah Crocetto, Erin Morley, Sopranos ; Mihoko Fujimura, Tamara Mumford, altos ; Simon O’Neill, ténors ; Ryan McKinny, baryton ; Morris Robinson, basse. Los Angeles Master Chorale, Pacific Chorale, Los Angeles Children’s Chorus, National Children’s Chorus Los Angeles Philharmonic ; Los Angeles Philharmonic Orchestra, Gustavo Dudamel. 2019. DGG. 1 e-Album Deutsche Grammophon.

A juste quarante ans, Gustavo Dudamel peut se flatter d’être un mahlérien les plus documentés en enregistrement, que ce soit en audio ou en vidéo. Actuellement seules les symphonies n°4 et n°6 manquent à son palmarès et comme ces deux symphonies figurent à son répertoire, cette carence sera naturellement comblée (les mahlériens émérites ont déjà repéré un live de la Symphonie n°4 sur le site du Concertgebouw d’Amsterdam). Musique d’orchestre et de chef, Mahler est évidemment un terrain de jeu naturel pour le virtuose de la baguette. Cela étant, si l’on tire un bilan de ses témoignages au disque : le très bon (symphonie n°1 et n°5), côtoie le moyen (symphonie n°2) ou même le décevant (symphonies n°3, n°7 ou n°9). Ce nouvel enregistrement californien du maestro vient prendre place à côté d’une précédente gravure vidéo où les forces du Los Angeles Philharmonic s’additionnaient à celles de l’Orchestre des jeunes Simon Bolivar pour un concert à Caracas avec plus d’un milliers d’exécutants. Documentée en vidéo chez DGG, cette interprétation enthousiaste manquait tout de même de fini et de précision. 

Captée en concert en mai 2019 sur la scène du Walt Disney Hall de Los Angeles, cette interprétation était l’apothéose des célébrations du Centenaire de la phalange. Cette nouvelle gravure disponible uniquement au format numérique présente un fini instrumental et choral vertigineux : la qualité des formations étasuniennes est foncièrement épatante. Si l’orchestre est grandiose, les choeurs sont exemplaires : Los Angeles Children’s Chorus et National Children’s Chorus Los Angeles Philharmonic. La distribution vocale est solide, homogène et engagée. La prise de son, si difficile dans cette œuvre, est une immense réussite tant dans sa globalité que dans le respect des détails ou le délicat équilibre entre les masses instrumentales et chorales. 

Mais au-delà de cette qualité technique, presque lisse tellement elle est belle, il faut se poser la question : qu’est-ce que Dudamel apporte à l'œuvre ? La réponse est mitigée ! Certes le chef sait construire l’arche architecturale de cette symphonie, il est des plus aptes à faire apparaître des lignes de force et à gérer la progression. Mais au-delà de cette satisfaction, il manque indubitablement le plus pour passer de l’excellent au transcendant ! On est en présence d’une belle lecture, qui au concert devait casser la baraque, mais qui dans un contexte phonographique assez démesuré qualitativement, peine à se hisser au niveau de : Solti (Decca), Bernstein (DGG), Rattle (Warner et Berlin Phil), Tilson-Thomas (SFS Live), Ozawa (Philips). 

Son : 10 – Livret : 10 – Répertoire : 10 – Interprétation : 8

Pierre-Jean Tribot  

   

 

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