L’Orchestre National de Belgique brille au Klarafestival

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Oeuvre trop rare au concert comme au disque, la Faust-Symphonie de Liszt n’en est que plus à sa place au programme d’un festival qui se veut ambitieux. Et il faut dire que la version qu’en donnèrent dans le cadre du Klarafestival Hugh Wolff et le Belgian National Orchestra (on nous excusera de grimacer en utilisant cette appellation réputée plus porteuse) fut remarquable en tous points. Menés avec enthousiasme et lucidité par leur directeur musical -dont ceux qui l’entendirent il y a plusieurs années à la tête du même ensemble dans une mémorable Troisième de Mahler savent que les grandes fresques orchestrales ne lui font pas peur- les musiciens du National se montrèrent parfaitement à la hauteur des redoutables exigences de cette monumentale oeuvre qui exige de ses interprètes non seulement de l’endurance sur les près de 80 minutes de sa durée, mais aussi un véritable souffle épique dans ce chef-d’oeuvre dont les trois mouvements sont autant de portraits des protagonistes du Faust de Goethe.

A Genève, un Philharmonique de Stockholm éblouissant

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Pour trois concerts à Zürich, Genève et Lucerne, le Service Culturel Migros invite l’Orchestre Philharmonique Royal de Stockholm sous la direction de son chef attitré, Sakari Oramo.

Comme clin d’œil au public helvétique, le programme débute par une page d’un Zürichois, Rolf Liebermann qui, selon l’adage « Nul n’est prophète en son pays », a fait sa carrière de directeur de théâtre à Hambourg et à Paris. Son Furioso, écrit en 1945, créé par Hermann Scherchen deux ans plus tard puis présenté avec succès au Séminaire de Musique Contemporaine de Darmstadt, est proprement effarant. En huit minutes, le piano donne la cadence en martelant avec véhémence une envolée virtuose du tutti scandée par des motifs « jazzy », avant que ne se développe une section lyrique où la flûte dialogue avec le cor anglais ; et c’est la reprise des divers thèmes qui amènera une brillante conclusion.

OPERA AS OPERA : une bible !

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Conrad L. Osborne, OPERA AS OPERA. The State of the Art. New York, Proposito Press, 2018 45 $ ( www.propositopress.com)

Opéra en tant qu’opéra ! Par ce titre un peu énigmatique, le critique newyorkais Conrad L. Osborne tente de définir ce phénomène si particulier en le considérant comme un tout et en analysant chacun des éléments qui le constituent. S’appuyant sur soixante années de pratique du genre, il élabore un énorme ouvrage de plus de huit cents pages pour traduire l’espoir et la frustration que nous tous, nous pouvons ressentir aujourd’hui par rapport à l’état actuel de la question.

Kent Nagano et l’OSM à Bruxelles

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C’était l’un des événements de la saison bruxelloise : la venue de Kent Nagano et de son Orchestre symphonique de Montréal dans le cadre d’une tournée européenne. Après Paris, le grand chef et ses musiciens posaient leur bagages pour une escale belge prestigieuse et attendue.

Le programme illustrait les facettes de l’art du chef aussi à son aise dans le symphonique que dans le lyrique. En apéritif du concert, Kent Nagano fait honneur à Berlioz avec les trois extraits symphoniques de la Damnation de Faust. Le chef se concentre sur la lisibilité de l’orchestration et l’équilibre des lignes mélodiques. Même la “Marche Hongroise” refuse le spectaculaire et privilégie la force révolutionnaire de l’écriture.

A Lausanne, une ARIADNE restituée à l’opéra de chambre

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Une vaste paroi de couleur neutre, trois portes dont celle du milieu s’ouvrant sur un débarras contenant les fusées et feux d’artifice de fin de soirée, le Compositeur et son professeur en complet noir, le Maître à danser, perruque orange sur habit bleu canard, le Perruquier en punk oxygéné, le Majordome en uniforme gris à col Mao, tout ce monde s’agite dans ce Prologue d’Ariadne auf Naxos mise en scène par David Hermann dans des décors de Paul Zoller, des costumes de Michaela Barth, des éclairages de Fabrice Kebour. Mais l’arrivée de Zerbinetta, flanquée de ses partenaires habituels, Harlekin, Scaramuccio, Brighella et Truffaldin, fait aussitôt référence à l’esprit de la ‘commedia dell’arte’ et à ses costumes de tradition.

La couleur des mains

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La JUIVE

C’est par une immédiate ovation debout que les spectateurs de l’Opéra d’Anvers ont salué La Juive (créée en février 1835) !

A Constance, au moment où s’ouvre le Concile qui en gardera le nom, deux groupes définis par leur religion -les chrétiens et les juifs- vivent côte à côte, mais de façon violemment conflictuelle, dans un contexte d’intolérance absolue. Leurs représentants : le Cardinal de Brogni et le joaillier père de famille Eléazar. Deux femmes aiment le même homme : Rachel, la juive, la fille d’Eléazar, et la Princesse Eudoxie, la chrétienne. L’homme, c’est Léopold : il fréquente la première sous une fausse identité et trompe la seconde à laquelle il est lié. Le père et le Cardinal sont unis par un terrible secret qui vaudra à l’œuvre sa fin atroce.

La Finta Pazza « d’après » Francesco Sacrati à Versailles : une déception.

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L’exhumation de partitions inconnues du XVIIe siècle présente un avantage : offrir une quasi « page blanche » au directeur musical. C’est donc de lui qu’il sera question ici beaucoup plus que de Francesco Sacrati (1605-1650) dont la Finta Pazza (la fausse folle) fut créée à Venise en 1641 avec succès, notamment grâce aux machineries fantastiques du grand « sorcier » Giacomo Torelli. C’est sous cette forme, avec des ballets de Balbi, que fut représenté pour la première fois en France un véritable opéra à l’invitation de Mazarin dans le but de divertir le jeune roi de 7 ans. Il semble n’en subsister que l’ossature (livret de Giulio Strozzi) privée de ses ballets et intrigues annexes. Après deux productions récentes dont celle d’Allan Curtis à La Fenice, c’est Leonardo Garcia Alarcon qui propose une nouvelle version à la tête de sa Cappella Mediterranea.

A Genève, un duo de choc !

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Le samedi 16 mars, dans un Victoria Hall bondé jusqu’au dernier strapontin, deux légendes du piano, Martha Argerich et son troisième époux, Stephen Kovacevic, ont donné un récital en répondant à l’invitation de l’Agence Caecilia pour sa prestigieuse série ‘Les Grands Interprètes’.

Deux pianos de concert sont placés côte à côte ; et le duo propose d’abord une transcription des Danses symphoniques réalisée par Rakhmaninov lui-même quelques mois après la création de la version originale donnée le 3 janvier 1941 par ses dédicataires, Eugene Ormandy et l’Orchestre de Philadelphie. Ce remaniement fut présenté lors d’une soirée privée d’août 1942 à Beverly Hills par l’auteur dialoguant avec… Vladimir Horowitz. Récemment, la firme Marston a publié un enregistrement de quelques extraits joués en solo par le compositeur à la fin décembre 1940, comportant des modifications harmoniques que nos interprètes ont décidé de restituer.

Patrick Davin dirige Dupont avec l’OPRL

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Le chef d’orchestre Patrick Davin, au pupitre de l’Orchestre philharmonique royal de Liège publie un disque consacré au compositeur français Gabriel Dupont (Fuga Libera). À cette occasion, le chef nous parle de ce compositeur et de sa place dans l’histoire de la musique.

 Comment est né le projet d’enregistrer des oeuvres de Gabriel Dupont ? Comment avez-vous découvert ce compositeur ?

 Le projet initial vient de Jérôme Lejeune qui est souvent partie prenante dans les premiers enregistrements de compositeurs. Il est toujours habité par cette soif de découvrir autre chose. C’est lui qui a proposé ce projet dédié à Gabriel Dupont. Il se fait que, tout à fait par hasard, j’ai une tradition d’enregistrement avec l’Orchestre philharmonique royal de Liège. J’avais déjà entendu le nom de Gabriel Dupont et plus particulièrement les Heures dolentes dont je connaissais la version pour piano. Je ne savais pas qu’il y avait aussi ces orchestrations et encore moins qu’il y avait une pièce orchestrée par quelqu’un d’autre. Je connaissais Gabriel Dupont de nom depuis 30 ans, grâce au pianiste Daniel Blumenthal qui m’en avait parlé au moment de l’enregistrement de ses œuvres pour piano. Maintenant, les Heures Dolentes ont été plusieurs fois reprises au disque. Je pense qu’à l’époque où Daniel Blumenthal l’a enregistré pour Cybelia, c’était une rareté. Cela m’avait intéressé mais plutôt « d’une manière désincarnée » car je n’en connaissais que la version pour piano.

Christoph Heesch, violoncelliste explorateur et narrateur  

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Le violoncelliste allemand Christoph Heesch a remporté un prix ICMA dans la catégorie “Concertos” pour son CD “Golden Age - Cello 1925”. Né à Berlin en 1995, il a commencé le violoncelle à l'âge de six ans. Il a également reçu une bourse de l'Académie internationale de musique du Liechtenstein. Lauréat du 25e concours du Deutsche Musikinstrumentenfonds, il joue un violoncelle Montagnana de 1722 prêté par la générosité d'une famille de Londres. Rémy Franck, président du Jury des ICMA, a rencontré le jeune musicien.

Vous avez remporté le prix ICMA 2019 dans la catégorie “Concertos” avec votre CD “Golden Age - Cello 1925”. Comment en avez-vous élaboré le programme?

J'ai toujours été fasciné par la variété des genres au cours des années ‘20. Malgré le malaise politique de l’époque, les musiciens, les compositeurs et les artistes ont, plus que jamais, osé être créatifs et ils ont même défini de nombreux nouveaux styles et genres artistiques. Grand fan de la Kammermusik No. 3 de Paul Hindemith, j'ai commencé à explorer le répertoire de cette époque et je me suis rendu compte que la définition du concerto pour violoncelle avait quelque chose de spécial. Dans les quatre pièces de cet enregistrement, les compositeurs (Hindemith - Ibert - Toch - Martinu) ont pris leurs distances par rapport à l'usage conservateur d'un orchestre symphonique et ils ont créé -chacun de manière très unique et intime- ce style révolutionnaire d'un concerto pour violoncelle avec un orchestre réduit. Sans doute parce qu'ils étaient tous plutôt jeunes, mais ils provenaient de pays où les influences musicales étaient différentes. Chez moi s’est développé le besoin de combiner ces quatre œuvres et de présenter ma propre interprétation de ces discours musicaux.