Mvsicae Antiqvae Ephemeris. Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Messe en fa majeur BWV 233. Tönet, ihr Pauken! Erschallet, Trompeten! BWV 214. Pastorale en fa majeur BWV 590. Concerto brandebourgeois no 6 en si bémol majeur BWV 1051. Sybilla Rubens, soprano. Stéphanie Houtzeel, contralto. Thomas Bauer, basse. Collegium Vocale de Gand, Philippe Herreweghe / Deborah York, soprano. Annette Markert, contralto. Jörg Dürmüller, ténor. Klaus Mertens, basse. Orchestre et Chœur baroques d’Amsterdam, Ton Koopman / Ton Koopman, orgue de l’abbaye de Melk / Nikolaus Harnoncourt, Gustav Leonhardt, viole. Edith Steinbauer, Eduard Melkus, alto. Frieda Krause-Litschauer, violoncelle. Alfred Planiavsky, contrebasse. Bruno Seidlhofer, clavecin. Josef Mertin, direction. Livret en anglais. 1950 et 2003, (ré)édition 2023. TT 76’06. Fra Bernardo FB 2311653
Cristian Măcelaru est de retour au pupitre de l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo pour ce second concert de la série estivale des Concerts au Palais princier. Il est accompagné par la jeune violoniste María Dueñas, l’un des noms qui s’impose dans le le milieu, portée par son contrat avec Deutsche Grammophon.
On remarque d’emblée des qualités indéniables : fraîcheur et tempérament juvéniles, sensation naturelle et intacte, maîtrise technique de l'instrument, son noble et personnel, joie de jouer tout en sourire... Est-ce suffisant pour conquérir l'auditoire ? Le Concerto pour violon n°1 de Max Bruch est une des œuvres favorites du public. María Dueñas semble avoir des difficultés malgré son sourire craquant. Il fait très chaud et humide, l'archet ne tient pas la route et de nombreux passages sont troubles.
Cristian Măcelaru soutient la jeune soliste dans un tempo détaillé et avec une dynamique soigneusement contrôlée, mais le résultat est décevant. Le dernier mouvement "presto stretta" majestueux et virtuose qui devrait terminer en feu d'artifice est plat. L'applaudimètre ne répond que modérément. María Dueñas dépose son bouquet à l'arrière de la scène et les applaudissements s'arrêtent. On est privé du bis virtuose qui aurait pu rattraper la performance.
Le Festival musical de Pärnu se clôture avec deux concerts finaux. Le premier a lieu le jeudi 18 juillet et le second le vendredi 19 juillet. Paavo Järvi et l’Estonian Festival Orchestra sont accompagnés de deux prestigieux solistes. Les deux concerts commencent avec la nouvelle pièce de la compositrice estonienne Helena Tulve, Wand’ring Bark, et se clôturent avec la Troisième Symphonie Op. 56 dite « Écossaise » de Mendelssohn. Le premier soir, la violoncelliste américaine Alisa Weilerstein interprète le Concerto pour violoncelle en mi mineur Op. 85 d’Elgar. Le second soir, le pianiste américain Kirill Gerstein interprète quant à lui la Rhapsodie sur un Thème de Paganini, Op. 43 de Rachmaninov.
Le Festival musical de Pärnu met un point d’honneur à mettre l’Estonie et ses talents à l’honneur. C’est dans cette démarche que l'œuvre a été commandée par le festival à la compositrice estonienne Helena Tulve. Elle dédie sa composition à ses premiers interprètes, Paavo Järvi et l'Estonian Festival Orchestra.
La pièce Wand’ring Bark est inspirée de la strophe centrale du 116ème sonnet de William Shakespeare. D’une durée approximative de 10 minutes, cette œuvre est mystérieuse et se compose d’une superposition de strates sonores plus ou moins importantes. De nombreux effets sont également utilisés et ce dans tous les pupitres de l’orchestre. L’orchestre réalise une excellente première version satisfaisant largement la compositrice présente dans la salle.
Lors de la première soirée, le public a le bonheur d’écouter la violoncelliste américaine Alisa Weilerstein dans le Concerto pour violoncelle en mi mineur Op. 85 d’Elgar. Composé à la fin de la Première Guerre mondiale (1918 - 1919), ce concerto n’était pas très populaire. Il faut attendre les années 60 et Jacqueline du Pré qui ajoute cette pièce à son répertoire pour qu’il gagne en notoriété. De nos jours, ce concerto est une œuvre phare du répertoire pour violoncelle. Alisa Weilerstein et l’EFO nous propose une version de grande qualité. La soliste fait preuve d’une intelligence musicale indéniable et communique à merveille avec l’orchestre. Ce dernier est mené avec précision et sensibilité par Paavo Järvi. Tous les musiciens sont pleinement investis. Tout au long des quatre mouvements, différentes atmosphères sont abordées. Les premiers accords sont joués avec gravité. Le lyrisme prend ensuite le pas dans ce premier mouvement. Dans le second mouvement la circulation du flux énergique est constante. Le troisième mouvement permet quant à lui d’atteindre des nuances à peine audibles, ce qui crée un contraste encore plus grand quand l’orchestre se déploie pleinement. Pour finir, le dernier mouvement conclut avec brio ce concerto.
Carl Michael Ziehrer (1843–1922) : Großstädtisch - Polka Schnell, Op. 438 ; Johann Strauss Sohn (1825–1899) :1001 Nacht- Intermezzo Aus Der Operette ; Josef Strauss (1827–1870) : Ohne Sorgen - Polka Schnell, Op. 271 ; Georg Kreisler (1922–2011) : Der Musikkritiker ; Johann Strauss Sohn (1825–1899) : Unter Donner und Blitz. Münchner Rundfunkorchester, direction et chant : Patrick Hahn. 2023. Livret en allemand et anglais. BR 900854 (Parution exclusivement digitale).
Gabriel Fauré (1845-1924). The Essential Piano Works. Ballade en fa dièse majeur, Op.19 ; Pièce brève, Op.84 ; Pavane, Op.50 ; Romande sans parolesen la bémol majeur, Op.17 n°3 ; 2e Impromptuen fa mineur, Op.31 ; 6e Nocturne en ré bémol majeur, Op.63 ; 7e Nocturneen ut dièse mineur, Op.103 n°3 ; 5e Barcarolle en fa dièse mineur, Op.66 ; Thème et variations en ut dièse mineur, Op.73. Laurent Wagschal, piano. 2023. Livret en français et en anglais. 66’27’’. Indésens Calliope Records. IC047
Gabriel Fauré (1845-1924). Complete Works for cello and piano. Sonate n°1 pour violoncelle et piano en ré mineur, Op.109 ; Sonate n°2 pour violoncelle et piano en sol mineur, op.117 ; Sérénade, Op.98 ; Elégie, Op.24 ; Romance, Op.69 ; Papillon, Op.77 ; Sicilienne, Op78. Pauline Bartissol, violoncelle ; Laurent Wagschal, piano. 2023. Livret en français et an anglais. 54’46’’. Indésens Calliope Records. IC051
La quatorzième édition du festival musical de Pärnu se tient en ce moment en Estonie. Ce grand évènement met en valeur la musique estonienne mais aussi les artistes estoniens. L’Estonian Festival Orchestra se trouve d’ailleurs plusieurs fois à l’affiche de la programmation. Nous revenons ici sur le concert de gala de musique de chambre ainsi que sur le concert de clôture de la classe de masterclass.
Ce mardi 16 juillet a lieu le concert de gala de musique de chambre au festival musical de Pärnu. Sur la scène du Pärnu Concert Hall, nous retrouvons des musiciens de l’Estonian Festival Orchestra. Le programme de ce concert est assez conséquent mais tout de même varié. Pas moins de 28 musiciens se produisent dans un programme allant de Smetana à Mahler. De plus, la part belle est faite aux compositeurs estoniens.
La première partie débute avec Scala cromatica d’Arvo Pärt. Cette pièce est un trio extrêmement bref (1’45’’ à 2’) composé en 2007 pour violon, violoncelle et piano. Le début est un unisson assez calme. La partie centrale s’anime de plus en plus autour d’une descente chromatique de quatre octaves du violoncelle. Le violon et le piano ponctuent cette descente par des interventions consonantes. Le climax est atteint avant de revenir à l’unisson calme du début. Cette courte pièce fait sourire le public et lance la soirée.
Ensuite place au deuxième poème symphonique issu de Má Vlast de Bedřich Smetana : Vltava. Cette pièce est certainement la plus connue du compositeur tchèque. Nous l’entendons cependant dans une version différente. L’orchestre est ici mis de côté et est remplacé par un quintette de cordes et un piano. La première partie de l’œuvre est bien exécutée mais il manque une certaine clarté et alchimie. Il faut attendre la partie en 2/4 pour obtenir une cohérence et une direction musicale allant dans le même sens. La fin de l’œuvre est très musicale avec un climax intense et une fin grandiose. Notons les interventions d’Angie Liana à la contrebasse donnant un côté profond à cette interprétation ainsi que le rôle crucial de Kärt Ruubel au piano qui doit remplacer toute l’harmonie.
George Enescu (1881-1955) : Octet, Op.7 ; Eugène Ysaÿe (1858-1931) : Harmonie du Soir, Op.31 ; Grażyna Bacewicz (1909-1969) : Concerto pour orchestre à cordes. Sinfonia of London, direction : John Wilson. 2022. Livret en anglais, allemand et français. Chandos CHSA 5325.
Ludwig Daser (1526-1589) : Missa Pater Noster. Benedictus Dominus. Ad te levavi oculos meos. Dilexi, quoniam. Danck sagen wir alle. Daran gedenck Jacob und Israel. Savum me fac. Fracta diuturnis. Fratres, sobrii estote. Christe, qui lux es et dies / Cinquecento Renaissance Vokal. Terry Wey, contreténor. Achim Schulz, Tore Tom Denys, ténor. Tim Scott Whiteley, baryton. Ulfried Staber, basse. Avec Franz Vitzthum, Filip Dámec, contreténor. Tomáš Latjkep, ténor. Colin Mason, baryton. Joel Frederiksen, basse.Octobre 2022. Livret en anglais, allemand, français. Paroles en latin, allemand et traduction en anglais et allemand. TT 69’46. Hyperion CDA68414
Music for 18 Musicians jaillit du programme (diversifié comme la ville qui l’accueille et plus teinté jazz cette année) de la quatrième édition du Walden Festival, « klassiek sur l’herbe », au Parc Léopold de Bruxelles (et ses lieux alentours : la bibliothèque Solvay, l’Espace Senghor, le lycée Émile Jacqmain…), joliment éclairé des rayons d’un soleil qui roule des mécaniques pour évacuer les nuages lourds de la veille : en habitué de la pièce, Ictus est à la manœuvre, sous la direction artistique de Tom De Cock et Gerrit Nulens et acoquiné cette fois avec des musiciens du Brussels Philharmonic et des voix du Vlaams Radiokoor.
Achevée en mars 1976 pour un instrumentarium alors innovant dans l’œuvre de Steve Reich (violon, violoncelle, deux clarinettes / clarinettes basses, quatre voix féminines, quatre pianos, trois marimbas, deux xylophones et un métallophone), le morceau s’enroule autour de deux rythmes simultanés – la pulsation régulière (c’est la marque de fabrique du compositeur minimaliste américain) des pianos et des percussions, et la respiration humaine, propulsée par les voix et les vents – et se structure sur un cycle de onze accords, joués au début et à la fin et distendus chacun au sein d’une petite section de cinq minutes pour en former la mélodie pulsée – à la manière d’un organum de Pérotin le Grand, compositeur français du 12ème siècle et père fondateur de la musique polyphonique occidentale.
L’autre source marquante d’inspiration pour Reich, qui déborde d’ailleurs du cadre de Music for 18 Musicians, est le gamelan balinais : le métallophone, qui ne joue qu’une fois ses motifs, déclenche le mouvement vers la mesure suivante ; il indique le changement par un signal audible qui, en même temps, prend part à la musique.
Jouée partout dans le monde (je l’ai vue pour la première fois aux mains de l’Ensemble Modern et de Steve Reich, alors âgé de 74 ans, à la Cité de la Musique de Paris), enregistrée sur disque par de multiples interprètes, l’œuvre est devenue un tube de la musique répétitive – un courant né lors de la création en 1964, à laquelle Reich participe, de In C, l’étrange partition (une page, un nombre indéfini de musiciens) de Terry Riley.
Le 12 juillet 2024 est une date à marquer d’une pierre blanche. Pour la toute première fois, les Percussions de Strasbourg se sont produites lors du Festival International de Colmar. En 62 ans d’existence pour l’ensemble et 45 ans pour le festival, il est étonnant que ce jour ne soit pas arrivé plus tôt.
Cette journée s’est ouverte à 12h30 avec un concert proposé par deux jeunes musiciens du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (CNSMDP), Federico Altare à la flûte et Martin Jaspard au piano. Pour l’occasion, les deux musiciens ont construit un récital basé sur des figures importantes du CNSMDP. Très à l’aise dans leur rapport au public et proposant des explications bien senties, Federico Altare et Martin Jaspard ont débuté avec la Fantaisie en mi mineur pour flûte et piano Op.79 de Gabriel Fauré. Cette œuvre fut composée pour un examen de flûte au conservatoire en 1898. Ensuite, nous avons pu entendre un arrangement par Federico Altare de la Sonate pour violon et piano L.140 de Claude Debussy, la Sonate en sol majeur N.5 Op.58 de François Devienne et le Chant de Linos pour flûte et piano d’André Jolivet.
En bis, les deux musiciens nous ont proposé une pièce écrite pour un examen de lecture à vue en flûte par Gabriel Fauré ainsi qu’une œuvre d’inspiration Ravelienne composée par Martin Jaspard. Que de maturité pour ces deux très jeunes musiciens ! Alliant une intelligence de phrasé et une compréhension totale des œuvres avec la fraîcheur de leur jeunesse, ils ont fait forte impression auprès du public. Avec un son très puissant et des basses particulièrement profondes, Martin Jaspard a toujours parfaitement géré ses nuances pour laisser de la place à Federico Altare et ses envolées virtuoses totalement maîtrisées. Il ne serait pas étonnant de les revoir bientôt sur la scène du festival !
À 18h, la salle du Théâtre Municipal de Colmar accueillait deux invités prestigieux, le clarinettiste Pierre Génisson et le pianiste Frank Braley. De la Fantasiestücke pour clarinette et piano Op.73 de Robert Schumann à un arrangement de la Rhapsody in Blue de Gershwin, en passant par la Sonate pour clarinette et piano N.1 en fa mineur Op.120 de Brahms et la Rhapsodie pour clarinette en si bémol de Debussy, le duo nous a fait vivre un moment magique. Très complices, les deux musiciens ont démontré tout leur talent. Pierre Génisson a une nouvelle fois prouvé sa maîtrise incomparable du phrasé et des nuances de son instrument, atteignant des pianissimos si doux qu’ils en devinrent presque imperceptibles. Frank Braley, quant à lui, a survolé le concert avec facilité, n’hésitant pas à ajouter un peu d’humour dans ses interactions avec le clarinettiste afin de charmer encore plus le public. En bis, ils nous ont proposé un arrangement du Prélude N.1 pour piano de Gershwin ainsi qu’un air de musique klezmer.