Rencontres

Les rencontres, les interviews des acteurs de la vie musicale.

Florian Noack, sur les traces de Prokofiev 

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Crescendo Magazine suit particulièrement le pianiste belge Florian Noack. Prix du Jeune musicien 2017 de l’Union de la presse musicale, lauréat d’un International Classical Music Award pour son précédent disque, notre jeune compatriote sait combiner la pertinence éditoriale et les qualités musicales. Dans un contexte musical pléthorique, les propositions musicales de Florian Noack se distinguent et séduisent. Alors qu’il sort un album Prokofiev, il nous explique la genèse de ce projet.

Pour votre deuxième album pour le label La Dolce Volta vous présentez un programme 100% Prokofiev ! Qu’est-ce qui vous a porté vers ce compositeur ? 

Plusieurs choses : à la fois l'envie et l'intuition qu'il était temps pour moi de m'attaquer, au disque, à un compositeur disons "majeur" du répertoire, et une affinité de longue date avec sa musique. L'impression aussi que, dans un certain imaginaire collectif (y compris le mien), on a peut-être spontanément tendance à associer Prokofiev à une esthétique assez dissonante ou percussive, et que ce préjugé (partiel et certes dû à certaines oeuvres extrêmement marquantes comme les Sarcasmes ou la Toccata) occulte d'autres visages du compositeur (le nostalgique, le rêveur, le féérique...). C’est un peu vers ces autres facettes que j'avais aussi envie de me tourner.

Sur ce disque, il y a des pièces connues, les Visions fugitives ou la Sonate n°6, mais aussi des raretés comme les Quatre études pour piano et les Contes de la vieille grand-mère. Comment avez-vous découvert ces oeuvres ? 

L'essentiel de ma connaissance du répertoire pianistique provient de l'ouvrage "La musique de piano" de Guy Sacre qui a été (et qui est toujours) mon compagnon d'exploration musicale. En l'occurrence, je connaissais les Études depuis longtemps, je les avais jouées lorsque j'avais 16 ans. La Sonate m'a été "révélée" vers mes 18 ans en écoutant le cours que mon professeur d'alors, Vassily Lobanov, donnait à une autre élève de la classe. Les Visions fugitives restaient une oeuvre un peu abstraite pour moi jusqu'il y a peu (je les connaissais depuis longtemps mais c'est peut-être le cycle que j'ai réellement découvert le plus récemment). Et les Contes de la vieille grand-mère m'ont été suggérés par mon épouse (je connaissais mal ce cycle-là).

Joseph Moog, face à Liszt 

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Le pianiste Joseph Moog, Prix « Jeune Artiste » des ICMA 2012, marque les esprits avec un parcours discographique et des choix de répertoire qui explorent de nombreux territoires -parfois rares- du répertoire, tant en récital qu’avec orchestre. Il sort ce mois-ci un enregistrement consacré à des pièces de Franz Liszt, partitions majeures de l’Histoire de la musique et du répertoire pianistique. 

Votre nouveau disque est entièrement axé sur Liszt ? Pourquoi avez-vous choisi ce compositeur ? 

Franz Liszt est un artiste et une personnalité diverse et complète que j’ai toujours profondément admirés. Regardez l'ensemble de son travail, le développement de son langage musical, les centaines d'étudiants qu'il a inspirés, sa riche vie personnelle et les nombreuses lettres qu'il nous a laissées ! 

Depuis mon enfance, j'essaie de comprendre ce phénomène. Plus je m'occupais de sa musique et de sa vie, plus je voyais clairement qu'il était poussé par une quête de toute une vie et cela expliquait les énormes contrastes qui entouraient cet artiste. De sa vie dévolue à son ordination d'abbé, du romantisme à l'Impressionnisme, de la sensualité à la spiritualité, tout est né de cette quête de réponses aux grandes questions de la vie.

Inspiré par le Zeitgeist (« l’Esprit du temps »), Goethe et Dante, il tente de mettre en musique la coexistence de la lumière et des ténèbres, du Yin et du Yang, bon ou mauvais. Liszt est tellement de choses mais, très certainement, il était un vrai philosophe illustrant la symbiose des contrastes de sa vie. C'est ce qui fait la vitalité de son art jusqu'à ce jour et c'est ce que j'ai essayé de dépeindre avec mon nouvel album.

David Kadouch, Révolution 

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Le pianiste David Kadouch est doublement en tête de l’actualité. Il sort un nouvel album (Mirare) qui porte le titre de « Révolution » ; parcours personnel à travers les oeuvres et les époques, ce nouveau disque est un superbe objet sonore, invitation à suivre un voyage narratif personnel entre les musiques. David Kadouch est également acteur d’un album consacré aux oeuvres concertantes de Philippe Boesmans (Cyprès) où il interprète Fin de Nuit pour piano et orchestre, partition dont il donna la création au printemps dernier à Liège et Bruxelles. Crescendo Magazine suit avec une attention particulière les projets de David Kadouch qui fut le premier “jeune artiste” des International Classical Music Awards en 2011. 

Ce nouveau disque se nomme “Révolution”. Pourquoi ce titre ? Qu’est-ce que la Révolution en musique représente pour vous ? 

J'ai choisi ce titre pour l'opposer au concept de mémoire. J'avais lu un livre fantastique d’Annie Ernaux qui s’intitule Les Années ; c’est une autobiographie à travers les grands événements de sa vie en France et dans le monde. Dans la dernière phrase du livre, elle écrit “sauver quelque chose du temps où on sera plus jamais”. Cela m’a beaucoup ému et je me suis dit que c’est une des définitions de ce que doit être l’art : témoigner ! Témoigner des gens que l’on aime, de ce que l’on a vécu car on sait que tout est condamné à disparaître. J’ai souhaité confronter “la mémoire” à un autre concept : celui de “révolution”. Car la révolution c’est exactement le contraire de la mémoire : c’est oublier tout, et recommencer en faisant un pas du rêve à la réalité. Dès lors, comment l’artiste est-il influencé dans son geste créatif quand tout s’effondre autour de lui, ou quand son pays traverse des bouleversements. J’ai choisi des oeuvres liées à des mutations du temps et de la société. Les artistes ont été bouleversés et ils ont créé sous cette impulsion. 

Votre précédent album “En plein air” était également une invitation à un voyage entre les styles et les époques. Un album doit-il forcément raconter une histoire ? 

Non, pas forcément ! Je sais juste que j'adore raconter une histoire mais c'est parce que je suis passionné de théâtre et de cinéma et que la narration est pour moi essentielle. Je vais tout le temps au théâtre et quand je sors d'une soirée, j‘ai souvent l’impression de repartir avec quelque chose de plus, comme une vision du metteur en scène sur une oeuvre classique, et cela m’influence dans la manière dont je construis mes programmes. Je n’ai pas très envie de faire un album avec un ou deux compositeurs qui s’affrontent. J’aime mieux raconter moi-même et suggérer des histoires, et j’espère qu’à l’écoute de l’album on ressort avec une vision d’ensemble qui n’est pas seulement celle de l’oeuvre mais qui est un message ou un sentiment général. J’espère que l’on peut écouter les choses différemment car le concert ou le disque m’apparaissent comme des expériences pour dire les choses de manière plus narrative. 

Frédéric Grün et Akane Sakai à propos du coffret “Rendez-vous avec Martha Argerich” 

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Les coffrets discographiques édités autour des projets de Martha Argerich sont depuis toujours des événements éditoriaux attendus des mélomanes du monde entier. Dès lors, le milieu musical fut surpris quand le label belge Avanticlassic annonça la parution d’un box regroupant des enregistrements captés au Festival Martha Argerich à Hambourg en 2018. Crescendo Magazine vous propose une rencontre avec Frédéric Grün, directeur du label et Akane Sakai, programmatrice du festival hambourgeois

Alors que les précédents projets de Martha Argerich (comme ceux à Lugano) étaient traditionnellement édités par Warner, l’arrivée de ce coffret chez un éditeur “boutique” comme votre label, comme le dit un confrère anglais, a été l’un des événements marquants de l’été ? Comment ce projet est-il arrivé chez Avanti Classics ? 

F.G. J’ai véritablement fait la rencontre de Martha Argerich quand, pour son premier album chez Avanticlassic en 2004, Polina Leschenko lui a proposé d’enregistrer la transcription pour deux pianos de Rikuya Terashima de la Symphonie Classique de Sergeï Prokofiev et que Martha a accepté. Cette séance d’enregistrement a été l’un des plus beaux jours de ma vie. Ensuite, les choses se sont faites naturellement. Martha et moi avons gardé le contact et, petit à petit, nous sommes devenus amis. Elle occupe aujourd’hui une place centrale dans ma vie.

Depuis ce jour de 2004, Martha accepte d’enregistrer pour Avanticlassic. Elle a réalisé un merveilleux récital avec Dora Schwarzberg et elle a même enregistré une chanson Yiddish sur l’album de Myriam Fuks. 

Lorsqu’en 2018, elle a décidé de lancer son nouveau festival avec Akane et Daniel Kühnel, l’intendant de l’Orchestre Symphonique de Hambourg, j’ai souhaité en réaliser les enregistrements et ils m’ont donné leur accord. 

C’était un énorme challenge pour Avanticlassic. Le Festival de Lugano était organisé en partenariat avec la Radio Suisse Italienne qui accueillait une grande partie des concerts dans son studio, fournissait le matériel d’enregistrement et les équipes et réalisait l’ensemble des enregistrements que Warner publiait. A Hambourg, Avanticlassic a assuré l’ensemble des moyens techniques et humains pour réaliser les enregistrements. Un formidable défi pour nous.

Semyon Bychkov, à propos de Tchaïkovski 

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Le chef d’orchestre Semyon Bychkov fait paraître un coffret consacré à l’intégrale des symphonies, des concertos et d’oeuvres symphoniques de Tchaïkovski (Decca). Enregistré au pupitre de la Philharmonie tchèque de Prague ce box est l’un des événement éditoriaux de l’année. Par sa hauteur de vue et l’intelligence du propos, ce coffret s’impose comme une pierre angulaire de la discographie. Entre les dates d’un agenda chargé qui l’a vu triompher aux BBC Proms de Londres et au Festival de Bayreuth, Semyon Bychkov répond aux questions de Crescendo-Magazine  

Quelle est pour vous la place de Tchaïkovski dans l’histoire de la musique ? Est-ce qu’il vous apparaît comme un révolutionnaire ?  

Je ne pense pas que Tchaïkovski soit un révolutionnaire ! C’est un peu comme “comparer” Beethoven et Mozart. Tout compositeur doit créer son univers ! Beethoven inventait son monde sonore à partir de moyens complètements novateurs alors que Mozart poussait à l’extrême les procédés compositionnels de son temps. Dans les deux cas, ils ont composé des chefs d’oeuvre absolus ! Tchaïkovski est pour moi plus proche d’une évolution des procédés existants que d’un disrupteur beethovénien ! 

Pour revenir à sa place dans l’histoire de la musique, Tchaïkovski était le premier compositeur véritablement professionnel en Russie. Grâce au mécénat de Nadejda von Meck, il a pu abandonner l’enseignement pour se consacrer pleinement à la musique. N’oublions pas que ses contemporains, aussi talentueux qu’ils pouvaient être, exerçaient un métier en parallèle de leurs activités de compositeurs : Borodine était chimiste, Cui était officier et Moussorgsky fut également militaire. De plus, Tchaïkovski a reçu a également reçu une éducation musicale très professionnelle et il avait une approche très exigeante de son métier. Alors qu’il était jeune, il passait ses étés à composer des fugues, au titre d’exercice, qu’il envoyait à Rimsky-Korsakov pour recueillir son avis ! Par ces aspects Tchaïkovski poussait son professionnalisme à l’extrême ! 

La place de Tchaïkovski dans l’Histoire de la musique parle d’elle-même ! Il a été incroyablement populaire de son vivant et il reste, plus d’un siècle après sa mort, comme l’un des compositeurs préférés du public. C’est un signe qui ne trompe pas ! Tchaïkovski parle à nos sens et à notre intellect, ce qui lui garantit une place majeure dans la postérité. 

Céline Moinet, hautboïste 

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Céline Moinet est hautboïste solo du légendaire Orchestre de la Staatskapelle de Dresde. Issue de l’école française de l’instrument, l’une des plus réputée au monde, elle fait paraître un nouvel album (Berlin Classics) consacré à des oeuvres avec orchestre de Jean-Sébastien Bach.

Après différents albums fort appréciés, dont un superbe disque dédié à Schumann (Berlin Classics), qu’est-ce qui vous a porté vers l’enregistrement d’oeuvres de Bach ? 

Ce sont des oeuvres qui ont bercé mon enfance. Elles ont insufflé mon amour pour cet instrument. Enfant, j’empruntais à la bibliothèque municipale du Vieux Lille une cassette audio avec le Concerto pour hautbois de Marcello. Le deuxième mouvement est bien connu du grand public et a été ornementé au clavecin par Jean-Sébastien Bach. J’ai beaucoup tenu à enregistrer cette pièce pour mon premier disque avec orchestre. 

Comment avez-vous conçu le programme de ce disque qui mêle les concertos pour hautbois et des sinfonias de cantates qui mettent l’accent sur le hautbois ? 

Le hautbois est très présent dans la musique de JS Bach, il tient un rôle très particulier dans ses cantates. J’ai choisi certaines sinfonias ainsi que les reconstructions de concertos qui se prêtaient le mieux à mon instrument. Le mouvement lent du Concerto en ré mineur est tiré directement de la Cantate “Ich steh mit einem fuß im grabe” BVW 156, bien connu du grand public.

Philippe Graffin, violoniste explorateur du répertoire 

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Le violoniste Philippe Graffin est un infatigable explorateur du répertoire violonistique. Déjà fort d’une discographie portée par une exemplaire curiosité, il vient d’enregistrer la Sonate n°7 d’Ysaÿe, redécouverte majeure qu’il emmène à travers la Belgique, en particulier au Festival Ysaÿe’s Knokke qui se déroulera au milieu de ce mois de septembre avant un concert à Liège, ville natale du musicien. 

Vous avez redécouvert la Sonate n°7, sonate pour violon opus posthume d’Eugène Ysaÿe. Comment avez-vous mis la main sur cette partition ? 

Cette œuvre dormait dans un cahier qui contient des esquisses de diverses sonates de l’opus 27 ainsi que d’autres œuvres, notamment la Sonate pour violoncelle seul op 28. Après la mort d’Ysaÿe, il a été entre les mains de l’un de ses proches, le violoniste Philip Newman et, après la mort de celui-ci, il est devenu la propriété de la violoniste belge Josette Lavergne. Au décès de cette dernière, ce cahier ainsi que nombre de documents ont été légués à la bibliothèque du Koninklijk Conservatorium Brussel. Ils m’ont invité à regarder ce document et nous nous sommes rendu compte qu’il contenait non pas une esquisse mais un véritable “premier jet” de trois mouvements qui constituaient une sonate. C’était supposé être la sixième, elle est donc aussi dédiée au violoniste espagnol Manuel Quiroga. Mais visiblement, Ysaÿe a trouvé qu’il devait écrire quelque chose en mi majeur, comme la dernière Partita du cycle de Bach ; il a ainsi abandonné cette sonate et écrit tout autre chose. J’ai terminé l’œuvre mais il n’y manquait pas grand-chose dans le dernier mouvement. C’est vraiment une belle œuvre d’Ysaÿe, importante, et je ne comprends pas, alors que le manuscrit a appartenu si longtemps à des violonistes, que nous n’en ayons pas entendu parler plus tôt ! 

Mathilde Serraille, bibliothécaire du Melbourne Symphony Orchestra 

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Crescendo-Magazine vous propose des rencontres avec des professionnels des métiers de la musique. Si l’attention se focalise traditionnellement sur les musiciens, l’organisation de la vie musicale nécessite un large panel de métiers. Pour ce premier rendez-vous, nous suivons Mathilde Serraille, bibliothécaire du Melbourne Symphony Orchestra, phalange symphonique des antipodes. 

Qu’est-ce qui vous a motivée à devenir bibliothécaire d’orchestre ? 

Rien ne m’a à proprement parler “motivée” car c’est un métier dont j’ignorais l’existence jusqu’à ce qu’une amie m’en parle ! Et pourtant je ne pouvais rêver mieux. Enfant, j’adorais les bibliothèques au point de créer des fiches pour les livres de mes propres rayons. Et la musique est une passion qui n’a fait que grandir depuis mes premières notes de harpe à six ans.

Ravie d’étudier à l’Université Lyon 2 en musicologie et au Conservatoire de Lyon en harpe et en culture musicale, j’ai vite été grisée par le bouillonnement intellectuel de ces institutions et l’érudition manifeste de mes enseignants et compagnons. La pratique instrumentale me plaisait mais je n’avais aucun don particulier pour envisager une brillante carrière de harpiste. J’ai donc décidé de devenir professeur d’université. Mais le parcours jusqu’à la thèse (qui d’ailleurs ne garantit pas l’avenir !) est long et j’ai donc cherché à travailler en parallèle de mes études. Après un mémoire consacré au catalogage d’œuvres pour harpe, un CDD de six mois à cataloguer des disques à la bibliothèque du Conservatoire de Lyon, puis un peu de secrétariat au département de musicologie de l’Université  Lyon 2 (et, au passage, la perte de quelques illusions sur le métier d’enseignant), j’ai été embauchée comme assistante-bibliothécaire à l’Orchestre National de Lyon.

Mihai Constantinescu, Directeur Général du Festival George Enescu 

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Le Festival George Enescu est l’un des grands événements de vie musicale en Europe. Pendant un mois, Bucarest vit au rythme frénétique de plusieurs concerts par jour avec les plus grands orchestres et les plus grands solistes. Célébrant la figure musicale centrale du compositeur George Enescu, il présente de nombreuses ramifications à travers le pays et passe en revue tous les styles musicaux avec, en particulier, un focus passionnant sur les musiques de notre temps. Alors que le Festival va s’ouvrir le 31 août avec la très symbolique Symphonie n°9 de Beethoven, Crescendo Magazine rencontre Mihai Constantinescu, le Directeur Général du Festival. 

Le programme du Festival est intitulé “Le Monde en Harmonie” ; pouvez-vous nous expliquer ce choix de thème ? 

Ce thème est directement inspiré par Enescu. Il disait que la musique avait un but sacré, celui d’unir les âmes. J’ai l’impression que nous vivons dans un monde plus dichotomique et segmenté que jamais. Sur la scène du Festival, plus de 50 nationalités, sans distinction de couleur, de sexe, de préférences ou de croyances, travaillent ensemble dans un but commun. L’orchestre est donc une métaphore du monde fonctionnel dans lequel nous aimerions vivre : collaboratif, inspiré, dans un acte artistique unitaire. En quelque sorte, nous pouvons observer le monde en harmonie à travers le Festival. Cela peut être une source d’inspiration, une occasion de réflexion et, pourquoi pas, d’orientations pour agir.

Norbert Gertsch, directeur éditorial chez G.Henle Verlag 

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Dans le milieu de l’édition musicale, l’éditeur allemand Henle est une référence connue des musiciens professionnels pour la qualité de ses parutions Urtext. Fondée il y a plus de 70 ans, cette maison d’édition peut s'enorgueillir d’un savoir-faire unique par son approche scientifique des textes musicaux, compétence toujours inégalée qui fait de chaque parution un événement. Crescendo Magazine s’entretient avec Norbert Gertsch, Deputy Managing Director qui assure la direction du programme éditorial de G.Henle Verlag 

Henle Verlag est l'un des principaux acteurs de l'édition musicale. C'est aussi un éditeur “historique” avec plus de 70 ans au service de l'excellence éditoriale. Comment avez-vous perpétué cet héritage?

En fait, Henle est l'un des jeunes éditeurs de musique classique. Il faut nous mettre en perspective avec d’autres éditeurs : Breitkopf & Härtel célèbre cette année ses 300 ans, Schott Music célèbrera ses 250 ans en 2020 quant aux Éditions Peters, elles sont dans le business de l’édition musicale depuis plus de 200 ans. Lorsque Günter Henle a fondé la maison d'édition en 1948, il poursuivait d'abord et avant tout un objectif : les éditions Urtext. C'était une énorme opportunité parce que les méthodes d'éditions scientifiques pour la musique imprimée n'avaient pas été exploitées à grande échelle. C'était un territoire en grande partie inexploré et les musiciens étaient évidemment impatients qu'il le remplisse le plus tôt possible. Les éditions Urtext de G. Henle Verlag ont aussitôt été une réussite ! Les fondations de cette qualité éditoriale résident dans un travail extrêmement fastidieux ; ce qui fait que le développement des projets nous demande généralement plusieurs années. Il a fallu des décennies pour remplir le catalogue et, même aujourd'hui, nous sommes toujours en train de publier des grands chefs d'œuvre. Il suffit de penser à l’édition des Quatuors à cordes de Mozart dont deux volumes sont déjà sortis et deux autres sont en préparation. Actuellement, il nous manque encore quelques concertos importants: les Concertos pour Piano de Tchaïkovski et Liszt, et le Concerto pour violoncelle de Dvorák, pour n'en citer que quelques-uns. Ainsi, pour répondre à votre question à propos de notre héritage : nous continuons à travailler au plus haut niveau de qualité pour publier des éditions critiques avec les critères d’une excellence scientifique optimisée pour l’interprétation.