Un faisceau de détails savoureux : les Noces de Figaro à Nancy

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Avant même qu’elle ne soit représentée, ce qui a d’abord retenu l’attention sur cette production, c’est l’identité de son metteur en scène : James Gray. Avant tout cinéaste reconnu, récompensé immédiatement en 1994 pour son premier film, Little Odessa, salué en 2013 pour The Immigrant, et tout récemment pour Ad Astra avec Brad Pitt. A Nancy, après le Théâtre des Champs-Elysées et avant Luxembourg, il était bien loin, spatio-temporellement, de l’univers de science-fiction de ce dernier film, tout en s’étant lancé un grand défi « spatial » : mettre en scène un opéra, Les Noces de Figaro, une première expérience.

Pari gagnant ! Rien de conceptuel dans son approche. Aucune « révélation » de sous-jacences historico-socio-psychologico-politiques jusqu’à lui ignorées dans l’œuvre de Mozart. Il s’en tient aux mots du librettiste et aux notes du compositeur. Même pas de vidéo chez ce cinéaste ! Rien ne vient distraire notre adhésion immédiate aux péripéties d’une intrigue exaltée par des chants superbes. Il est vrai qu’en procédant ainsi, il nous laisse libres, sans les solliciter, sans les imposer, de nos conclusions quant aux façons de procéder des « puissants » de ce monde-là, qui, humainement hélas, sont encore trop souvent les nôtres, dans leurs abus sexuels et de pouvoir. 

Tableaux d'enfance

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Dimitri KABALEVSKI (1904-1987) : Cinq variations faciles op. 51 ; Trente pièces pour enfants ; Aram KHATCHATURIAN : Tableaux de l’enfance ; Dix pièces pour jeune pianiste. Tristan Pfaff, piano. 2019. Livret en français et en anglais. 71.41. Ad Vitam AV 191215.

Le concert 2020 des International Classical Music Awards

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La cérémonie de remise des prix et le concert de gala des dix ans des International Classical Music Awards se déroulera à Séville, le 30 avril à 20 heures, au Teatro de la Maestranza. Il proposera une affiche des plus riches et des plus variés de l’histoire des ICMA.

Accueilli par l'Orchestre Symphonique Royal de Séville et le chef d'orchestre américain John Axelrod, le concert mettra en vedette la pianiste Elisabeth Leonskaja, récipiendaire du Prix pour l'ensemble de sa carrière, la soprano Marina Rebeka, Artiste de l'année, les violoncellistes Erica Piccotti, Jeune Artiste de l'année et Philipp Schupelius, prix Découverte 2020. John Axelrod, lauréat d'un Prix spécial, dirigera son troisième gala des ICMA.

D'autres lauréats de différentes catégories de prix joueront et chanteront : le célèbre guitariste espagnol Pepe Romero, la flûtiste à bec Dorothee Oberlinger, les pianistes Can Çakmur, Kirill Gerstein et Cédric Tiberghien ainsi que le ténor İlker Arcaryürek. Enfin, le public pourra assister à la création mondiale d'une nouvelle œuvre du musicien luxembourgeois-espagnol Ivan Boumans, lauréat du prix du compositeur, Organic Beat !

Elsa Dreisig en voyage initiatique

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« Morgen ». Henri DUPARC (1848-1933) : L’Invitation au voyage ; Phidylé ; Sérénade florentine ; Aux étoiles ; Chanson triste ; Extase ; La Vie antérieure. Richard STRAUSS (1864-1949) : Vier letzte Lieder ; Malven ; Morgen. Serge RACHMANINOV (1873-1943) : Six Romances op. 38. Elsa Dreisig, soprano ; Jonathan Ware, piano. 2020. Livret en anglais, français et allemand. Textes en langue originale, avec traductions. 76.50. Erato 0190295319489.

Crescendo Magazine recrute des collaborateurs pour Bruxelles et le Nord de la France. 

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Vous aimez la musique classique et la danse sous toutes leurs formes, devenez rédacteur pour Crescendo Magazine.

À l’occasion de la nouvelle saison, Crescendo Magazine souhaite étoffer son équipe d’une trentaine de chroniqueurs et recherche des rédacteurs pour couvrir l’actualité musicale à Bruxelles et dans la région des Hauts de France (Lille, Tourcoing…).

Fondé en 1993 comme magazine papier, Crescendo Magazine est désormais un site internet aux ramifications internationales. Il couvre l’actualité musicale du monde entier et propose des chroniques des concerts et spectacles en Belgique, Luxembourg, Suisse, France,... Sa rubrique dédiée aux partitions est unique sur un site internet francophone consacré à la musique classique. Les Joker(s) de Crescendo récompensent les meilleures parutions identifiées par les rédacteurs.

Olivier de Spiegeleir : « Beethoven a atteint la perfection absolue »

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Le pianiste Olivier de Spiegeleir s’est fait une spécialité des « récitals commentés » qui, sans verbiage savant, présentent les œuvres qu’il joue tant en Belgique que sur la scène internationale, de la Chine à l’Amérique latine. Si son répertoire court de Bach à Lutoslawski, il avoue une prédilection toute particulière pour Beethoven. Il a d’ailleurs gravé chez Cyprès trois célèbres sonates (Clair de lune opus 27/2, la Tempête opus 31/2, Pastorale opus 28) et les 33 Variations Diabelli, ainsi que l’intégrale des Bagatelles chez Pavane. A la veille de son concert Beethoven au Conservatoire de Bruxelles (1), il était un interlocuteur de choix pour évoquer avec Crescendo.be le génie de Beethoven, en cette année qui célèbre le 250e anniversaire de sa naissance. 

Qu’admirez-vous tout particulièrement chez Beethoven ?

On a dit de Bach qu’il était un Dieu, Mozart un ange, et Beethoven un homme. Un homme qui se bat contre son destin avec une force héroïque, et c’est ce que j‘admire chez lui. Il est le symbole du triomphe d’un idéal par rapport à la petitesse et à la souffrance de l’être humain. Je pense d’ailleurs que c’est l’une des raisons pour lesquelles il parle à tout le monde.  

Où se niche son génie ? 

Curieusement, on ne peut pas dire qu’il ait été un grand mélodiste. En revanche, et il est là son génie, il a créé des structures parfaites basées sur des cellules musicales tellement inouïes qu’elles ont acquis une célébrité universelle. Pensez aux premières notes de la 5e Symphonie – po, po, po, pom…. Trois notes égales, suivies d’une tierce descendante. Personne n’avait fait cela avant lui. Or, si dans une conversation avec des gens qui ne connaissent rien à la musique classique, vous lancez les trois notes « po, po, po », tout le monde va compléter par le « pom ». Comment diable a-t-il imaginé cette cellule sonore qui a un tel impact chez chacun ? Celle-là et tant d’autres… ! Prenez sa première sonate. Elle commence par un accord parfait de fa mineur, ce qui n’est pas très « mélodieux » a priori. Mais il le découpe, raccourcit, monte… et cela devient superbe. Autre exemple, la Waldstein, qui offre un premier thème en do majeur, et un second thème en mi majeur. C’est totalement hérétique, mais cela passe tellement bien…

Josep Pons, chef d’orchestre 

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Le chef d’orchestre espagnol Josep Pons, actuel directeur musical du Liceu de Barcelone, était au pupitre de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse pour un concert Ravel/de Falla triomphal. On doit à ce maestro des enregistrements révolutionnaires de la musique de Manuel de Falla pour Harmonia Mundi et DGG. Il revient sur la place de compositeur dans l’Histoire de la musique et nous parle de la vie musicale espagnole.  

Quelle est la place de Manuel de Falla dans l’histoire de la musique espagnole ? 

Sa place est prépondérante et essentielle. Il faut se replacer dans une perspective historique. L’Histoire de la musique espagnole connaît une apogée au XVIIe siècle, le siècle d’or avec les grands polyphonistes à l’image de Cristobal de Morales, Francisco Guerrero, Diego Ortiz. Au XVIIIe siècle, l’importance de la musique commence à décliner. Si la peinture reste un domaine d’excellence avec des peintres comme Velasquez et Goya, la musique se caractérise par l’importation de talents étrangers comme Boccherini ou Scarlatti. Au XIXe siècle, le niveau musical est devenu très faible et il y a un grand retard par rapport aux autres pays européens comme la France, l’Allemagne ou l’Italie.  Ainsi, certaines symphonies composées à la fin du XIXe siècle présentent encore des basses continues alors que Haydn les avait abandonnées un siècle auparavant. C’est dans ce contexte qu’apparaît, et alors que rien ne le laissait présager, la figure de Manuel de Falla. Il hisse la musique espagnole au niveau européen. Certes sa production est numériquement petite, mais à l’exception des œuvres de jeunesse dites « PreManuel de AnteFalla », ses partitions sont de première importance. On peut le comparer à Maurice Ravel avec qui il partage une œuvre réduite en quantité mais dont la place dans l’Histoire de la musique est considérable. Il ne faut pas non plus perdre de vue que l’affirmation du compositeur n’aurait pas été possible sans le tissus musical parisien du début du XXe siècle. N’oublions pas que c’est Debussy qui se démène pour que son opéra La Vie Brève puisse être créé à Nice en 1913 ! En fréquentant Paris qui regroupait alors l’élite des compositeurs mondiaux -Debussy, Ravel, Stravinsky…- Manuel de Falla a très rapidement été reconnu comme l’un des leurs ! 

En toute intensité : Don Carlos de Giuseppe Verdi à Liège

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Allons à l’essentiel : les émotions intenses vécues, le plaisir éprouvé. Ils sont liés à la qualité et à l’engagement du plateau vocal. De belles voix au service d’une partition idéalement conçue pour qu’elles s’épanouissent et expriment les sentiments et passions qui agitent les personnages. 

Celui qui m’a le plus touché est Rodrigue, Marquis de Posa. Il est en quelque sorte l’axe du livret : ami de cet infant Don Carlos qui voit ses espérances amoureuses avec Elisabeth de Valois brisées par la décision de Philippe II, son père, d’épouser la jeune femme. Favori de ce roi qu’il doit servir et qu’il trahira par amitié ; victime enfin des terribles réquisitions et condamnations du Grand Inquisiteur. Lionel Lhote lui donne une ampleur vocale et une présence scénique remarquables. Quel bonheur de le suivre dans les joies de l’amitié, dans les affres du dilemme : le roi ou l’ami. Gregory Kunde impose tous les grands élans de Don Carlos, de l’amour partagé au traumatisme révolté face aux décisions de son père, en passant par l’exaltation de l’amitié avec Rodrigue. Bonheur aussi des voix d’Ildebrando D’Arcangelo en Philippe II, de Roberto Scandiuzzi en Grand Inquisiteur. Plénitude amoureuse, malheur, jalousie, désespoir vivent tout aussi intensément dans les voix féminines. Kate Aldrich est une Princesse Eboli successivement envahie par l’espoir amoureux, la jalousie vengeresse et le repentir. Quant à Yolanda Auyanet, après avoir incarné émois amoureux et résignation, elle a malheureusement dû, souffrante, passer le relais après l’entracte à Leah Gordon qui n’a pas manqué la chance qui s’offrait à elle. Paolo Arrivabeni « harmonise » le tout à la tête de l’Orchestre et des Chœurs de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège.