Le pianiste français François-Frédéric Guy est incontestablement l’un des plus grands beethovéniens actuels. Le projet de l’intégrale des sonates avec des jeunes pianistes, initialement prévu en mars dernier, voit enfin le jour ce week-end à Paris. Le musicien nous a parlé de sa passion pour le maître de Bonn.
Vous avez donné l’intégrale des sonates de Beethoven en novembre dernier au Japon et les cinq concertos de Beethoven en janvier de cette année à Paris avec l’Orchestre de Chambre de Paris. Pourriez-vous parler de ces deux séries ?
L’intégrale des 32 sonates au Japon était pour moi un événement très important. D’abord, c’était la dixième fois que je jouais ce cycle. C’était donc une sorte d’anniversaire d’un projet fou que j’ai fêté à Tokyo – Vous savez, j’ai un amour inconditionnel pour le Japon ! J’ai eu une chance inouïe d’avoir pu réaliser cette série de neuf concerts dans la magnifique salle de Musashino Civic Cultural Hall, d’autant que le public était enthousiaste. Tous les concerts étaient complets. Et après chaque concert, dédicace de disques pendant des heures, un rituel typiquement japonais… Il y a eu une standing ovation tout à la fin, au dernier concert, les auditeurs étaient emportés, déchaînés, ils poussaient des cris, comme dans un concert de rock ! Pour ma part, je n’ai jamais vu ça au Japon ! Les Japonais sont d’habitude très calmes et très disciplinés, même quand ils aiment, ils gardent une distance, ils sont réservés, par politesse aussi, peut-être. Mais là, c’était… merveilleux. Vraiment merveilleux.
Ensuite, à Paris, nous avons également eu un grand succès avec l’Orchestre de Chambre de Paris, au théâtre des Champs-Élysées, pour les cinq concertos en une soirée que nous avons joués à guichets fermés. Nous avons d’abord donné un premier concert, suivi d’une pause longue pendant laquelle les gens pouvaient dîner, moi aussi d’ailleurs ! Puis, un autre concert et après 20 minutes de pause, enfin le Cinquième Concerto. C’était un grand voyage exceptionnel. Je suis depuis trois ans un artiste associé à l’Orchestre de Chambre de Paris et nous avons construit beaucoup de projets originaux ensemble. Nous avons joué plusieurs concerts à Paris, dont beaucoup en jouer-diriger. J’ai fait mes débuts en tant que chef d’orchestre avec eux à Paris avec la Cinquième Symphonie de Beethoven, en 2018, en première partie le Triple Concerto dirigé du piano. Un moment inoubliable pour moi !
« Je ne conçois pas une intégrale comme un marathon,
mais comme un grand voyage »
L’idée de donner l’intégrale des concertos ou des sonates en un temps court n’est pas de faire un marathon, mais plutôt celle d’un voyage. Offrir au public une occasion d’entendre ces œuvres dans la continuité et de suivre son évolution, depuis des compositions de jeunesse qui imitent encore Mozart pour arriver, en ce qui concerne les sonates, à la maturité, à ces dynamites beethovéniennes, à l’explosion du style classique.
Pour les sonates qui sont échelonnées sur toute sa vie, je les considère comme une autobiographie.